Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris
n°7
Cécile Kubik

Des méthodes pédagogiques inédites comme contribution à la connaissance interprétative du XIXe siècle violonistique français

Article
  • Résumé
  • Abstract

Les écrits pédagogiques de violon en France au XIXe siècle ont fait l’objet de différents travaux, basés sur l’étude d’une poignée de traités rédigés par les grands pédagogues de ce temps. Cependant, c’est un nombre considérable de ces méthodes que j’ai répertorié au cours de mes recherches de thèse sur l’interprétation des sonates françaises pour piano et violon au XIXe siècle. Ce corpus méconnu engage à reconsidérer nombre de vues et de conceptions acquises, en offrant aussi, et surtout, un éclairage inédit sur l’interprétation des œuvres pour violon de cette époque.

Texte intégral

Qu’ils doivent être rares les violonistes à n’avoir jamais joué une sonate de Franck ou de Fauré ! Pourtant, notre connaissance du XIXe siècle violonistique français reste étonnamment fragmentaire sur le plan de l’interprétation. C’est donc avant tout dans une démarche interprétative que je souhaite placer mes recherches sur les méthodes pédagogiques françaises écrites pour cet instrument au XIXe siècle.

 

Une poignée de ces traités a été largement étudiée et commentée ; ce sont ceux des plus grands violonistes et pédagogues de ce temps. Les sommes qu’ils représentent font autorité, tant par le détail et le soin apportés à leur rédaction que par leur traitement complet d’un large panel de sujets. Néanmoins, mes recherches initiales menées à la Bibliothèque nationale de France (BnF) m’ont confrontée au surgissement d’un nombre important de ces méthodes : c’est de cent soixante-neuf ouvrages publiés à Paris au XIXe siècle que je trouve trace. Cette découverte pose dès lors des questions essentielles : la multiplicité de ces volumes apporte-t-elle des informations supplémentaires propres à enrichir notre connaissance de l’interprétation violonistique à cette époque ? Faut-il donc considérer cette dernière sous l’angle d’une douzaine de méthodes célèbres, fussent-elles remarquables comme elles le sont, quand près de cent soixante-dix sont publiées ?

 

Le statut des grandes méthodes est et restera celui de références incontestables, mais c’est mon parti que de prendre en compte et d’étudier l’intégralité du corpus, pour envisager une vue d’ensemble inédite, à la lumière de cette diversité. De nombreux thèmes, choisis depuis l’exemple de la tenue des instruments jusqu’à celui des traditions non écrites dont certains auteurs nous livrent quelques parcelles, en passant par le cas des signes utilisés ou la réalisation des ornements, révèleront la richesse de cette collection de traités, au bénéfice de l’interprétation des œuvres pour violon du XIXe siècle.

 

Un corpus en constante évolution

 

D’abord quelques précisions numériques. Le chiffre avancé à ce jour de cent soixante-neuf méthodes publiées à Paris au XIXe siècle est à nuancer. C’est bien de cent soixante-neuf dont je trouve trace, mais mes recherches en avèrent pour l’instant cent vingt-quatre, la différence étant constituée de références citées par deux auteurs (Wirsta, 1971 ; Stowell, 1985) et dont je ne suis pas – pas encore ? – parvenue à découvrir les ouvrages. De nombreux cas sont d’ailleurs délicats : je m’interroge par exemple pour savoir si la Méthode de violon sympathique de Turbry citée par Robin Stowell et la Méthode sentimentale de violon de Turbri présente à la BnF sont deux ouvrages différents. Quant à Martinn, la question reste ouverte de savoir si la Grande méthode de violon et la Petite méthode de violon mentionnées par Stowell diffèrent de la Méthode de violon relevée par Artistide Wirsta, ainsi que de la Méthode élémentaire pour le violon et de la Méthode de violon avec exercices et gammes dans tous les tons conservées par la Bibliothèque nationale. Où se trouvent la Méthode de violon de P. Roy et la Petite méthode de violon de C. E. Roy, publiées toutes deux vers 1827 d’après Stowell ? Je trouve trois éditions révisées de cette dernière, mais pas l’original.

 

Mon propos n’est évidemment pas de mettre sur le même pied la méthode d’un Baillot ou d’un Bériot avec l’ouvrage de trente pages d’un auteur inconnu. Si cependant cet auteur fait figurer dans un opuscule sans grand intérêt une illustration peu ordinaire de la tenue des instruments, faut-il dédaigner la vision qu’il nous propose, a fortiori lorsque ce genre d’exemple se multiplie dans le corpus ? Doit-on ignorer ces ouvrages au prétexte que leurs auteurs n’étaient pas, comme ceux des grandes méthodes connues, des professeurs réputés ? Il est intéressant de se pencher sur ces témoignages en marge de l’enseignement officiel, quelquefois aussi émanant de province, dont nous avons peu d’écho, et où ces méthodes furent publiées avant ou parallèlement à la parution parisienne.

 

La tentation est grande – comme voilà 40 ans Aristide Wirsta, dans sa thèse basée sur l’examen d’un solide corpus – la tentation est grande de balayer ces méthodes rédigées par des violonistes pas toujours illustres1, en arguant d’arguments de poids. Certains de ces traités ne sont en effet que de simples plagiats, beaucoup ne comprennent presque aucune indication pour accompagner la compilation d’airs destinés à l’étude, d’aucuns proposent seulement quelques chapitres et font silence sur des pratiques élémentaires, d’autres sont destinés aux « commençants » et n’ont donc pas vocation à expliquer dans le détail la manière de réaliser un staccato. D’autres encore s’adressent aux amateurs, comme l’illustration d’un engouement général pour la pratique instrumentale, favorisé par une grande vigueur de l’édition musicale.

 

Toutefois, plusieurs documents de plus de consistance n’ont encore jamais fait l’objet d’un examen détaillé. Le dépouillement de ces méthodes, en bonne voie, s’inscrit dans un travail de longue haleine qu’il me reste à poursuivre et à compléter. Enfin, si j’ai référencé ces ouvrages sur l’ensemble duXIXe siècle, mon travail se porte essentiellement, en lien avec ma thèse, sur les méthodes antérieures à 1870, période aussi peu connue que déterminante et véritable charnière entre le XVIIIe siècle et la modernité.

 

Divergences, convergences

 

Il est bien entendu des phénomènes de convergence dans ces traités, des pratiques qui apparaissent similaires chez la plupart des auteurs, petits ou grands. Je parlerai de ces constantes au fil de ma démonstration, mais c’est à la diversité que je souhaite surtout m’attacher, parallèlement à ces évocations, car c’est celle-ci que ce corpus dévoile avant tout.

 

De la tenue de l’archet

 

Avant même de jouer une note de musique, la tenue des instruments entre en jeu. L’évolution de la lutherie – violon comme archet – est un facteur capital à prendre en compte pour l’appréhension des indications. C’est peu avant 1800 que François-Xavier Tourte porte l’archèterie française à son niveau de perfection, en imposant un modèle de baguette concave, en bois de Pernambouc, qui est toujours celui de nos archets modernes. Du Consulat à la Restauration, au moins, l’archet convexe du siècle précédent coexiste avec le modèle de Tourte et ses évolutions successives. Mais dès 1834, Baillot recommande à ses lecteurs l’utilisation de l’archet moderne de Tourte.

 

Les prescriptions des auteurs sur la tenue des instruments sont étonnantes de diversité et, parmi les méthodes connues, déjà, certaines dissemblances se manifestent à côté des similitudes. Je prends l’exemple du pouce de la main droite. Plusieurs auteurs célèbres ne livrent aucune précision à ce sujet2. Baillot nous dit qu’il faut « éviter de plier le pouce »3 (Baillot, 1835, p. 12) quand Bériot le veut « ni trop plié ni trop tendu » (Bériot, 1857, p. 4). Pour Mazas, il « ne pliera que très peu » (Mazas, 1830, p. 3).

 

Concernant mon corpus, Guichard donne son opinion4 :

« Il [le pouce] doit être tendu et pincer la baguette par son côté intérieur, tout près de l’ongle. » (Guichard, 1851, p. 8) 

 

Mais l’avis diffère chez Cornette :

« Le bout du pouce que l’on penchera un peu vers la main se placera près et au dessus de la hausse entre le bois et le crin et vis-à-vis le 2d doigt, il ne doit être ni courbé ni tendu. » (Cornette, 1855, p. 6) 

 

Tandis qu’Herman partage l’opinion de Guichard :

« Soutenir l’archet avec tous les doigts, la main arrondie, éviter de plier le pouce […]. » (Herman, 1875, p. 5) 

 

Carnaud Jeune, quant à lui, exprime une autre inclination :

« Cette manière de tenir l’archet est la plus générale, mais nous préférons la suivante : le pouce à moitié sur la baguette et l’autre moitié sur le talon de la hausse, qui dans ce cas devra être arrondi. » (Carnaud Jeune, c. 1879-1882, p. 5) 

 

Ces différences sont également présentes quant au placement de l’index droit sur la baguette. Si beaucoup d’auteurs5 suivent, souvent jusque dans sa formulation – quoique rarement en citant leur source –, la prescription faite par la méthode de Baillot, Rode et Kreutzer6 que « la baguette doit être posée sur le milieu de la deuxième phalange de l’index » (Baillot, Rode, Kreutzer, 1803, p. 5-6), d’autres voix se font entendre.

 

Kaudelka préconise ainsi que :

« L’archet doit être tenu par tous les doigts réunis et posé dans la première jointure de l’index, la main étant arrondie. » (Kaudelka, sans date, page non numérotée) 

 

L’avis de Cadot est différent :

« Il faut tenir l’archet du bout, le pouce en dessous de la hausse les quatre doigts sur la baguette et avancer l’index jusqu’à la deuxième jointure. » (Cadot, c. 1820, p. 10) 

 

Les fils Alday apportent quelques précisions :

« L’archet doit être soutenu par tous les doigts, et posé dans la première jointure de l’index, qui, étant légèrement arrondi et sans roideur, portera la baguette jusqu’au milieu de sa seconde phalange. » (fils Alday, publication entre 1821 et 1833, p. 3)

 

Mais pour Guichard :

« La baguette doit porter transversalement sur le milieu de la première phalange de l’index et sur le bout du petit doigt. » (Guichard, 1851, p. 8)

 

Cornette estime que :

« L’archet pris de la main droite, on le placera dans la première articulation de l’index […]. » (Cornette, 1855, p. 5) 

 

Les grands auteurs ne sont pas les seuls à offrir des illustrations de la tenue des instruments. Ce sont des représentations très différentes que nous proposent par exemple Roger, Guichard et Bretonnière, dans ces planches tirées de leurs méthodes.

 


	Roger, 1841, p. 8.

Roger, 1841, p. 8.


	Guichard, 1851, page non numérotée.

Guichard, 1851, page non numérotée.


	Bretonnière, 1862, p. 12.

Bretonnière, 1862, p. 12.

 

Loin d’une pratique uniformisée, ces exemples font témoignage de diversité et soulignent l’attention à porter à ces données, en préalable de la pensée musicale.

 

De la tenue du corps

 

En parallèle de ces champs divergents, les auteurs s’accordent sur d’autres points. La posture du corps, porté sur le côté gauche, jambe droite légèrement pliée, pied droit vers l’extérieur, épaule gauche en retrait, est relatée avec les mêmes caractéristiques chez la quasi-totalité d’entre eux7 et souvent illustrée, comme ici :

 


	Guichard, 1851, page non numérotée.

Guichard, 1851, page non numérotée.

 

Cette position, que les auteurs détaillent en insistant sur son caractère noble, ne se retrouve guère aujourd’hui ; c’est un élément qui contribue au son, à la manière de démancher8 ou de conduire l’archet – tous aspects de la plus grande importance dans l’interprétation. Sur ce point, outre la position des pieds qui fait souvent l’objet de précisions mesurées9, il est une autre constante qu’aucun pédagogue, à ma connaissance, ne conteste : la position du bras droit et du coude, où l’avant-bras seul guide l’archet, le bras se contentant de suivre et le coude restant sans force le long du corps :

 


	Blanc, 1846, p. 1.

Blanc, 1846, p. 1.


	Guichard, 1851, page non numérotée.

Guichard, 1851, page non numérotée.

 

Cette manière de tenir le bras droit, coude baissé même à la pointe, est très différente des prescriptions actuelles, où le coude droit est tenu haut. Il s’agit là d’une divergence fondamentale par rapport aux usages d’aujourd’hui – différence qui impacte grandement sur les coups d’archet, leur longueur, l’articulation, le nombre de notes que peuvent contenir les liaisons, la vitesse d’archet10. C’est tout un ensemble de pratiques qu’induit cette position. Les longues liaisons souvent notées dans les sonates de Baillot ou d’Alard deviennent dès lors compréhensibles, qui sont difficiles et de si peu d’effet avec la tenue moderne et prennent soudain une toute autre direction musicale dans la position en usage au XIXe siècle.

 

De la réalisation des petites notes

 

Passée la question des instruments intervient celle de la notation. Je choisis deux exemples rebattus que sont la réalisation des petites notes d’une part, celle du trille d’autre part. Il s’agit là d’un questionnement interprétatif, celui du musicien actuel qui s’interroge sur la manière d’exécuter des signes notés sur la partition. Je donnerai plus avant matière à réflexion sur des pratiques qui échappent à la notation.

 

Les auteurs sont souvent loquaces sur le sujet des petites notes, au point qu’il est rare de rencontrer une méthode en manque de théorie sur la manière de les réaliser. On comprend, dans l’illustration de Demar, que celle-ci est déterminée par différents paramètres liés au contexte musical : fonction harmonique, tempo, cadre métrique déterminant les temps forts et faibles, caractère du morceau, ligne mélodique.

 


	Demar, c. 1797-1802, p. 8.

Demar, c. 1797-1802, p. 8.

« Des petites notes ou notes postiches.

Les petites notes qu’on rencontre dans la musique servent de liaison et d’agrément. Ces petites notes n’entrent pour rien dans la mesure, on ne les nomme jamais en solfiant. Quelquefois la petite note vaut autant, et quelque-fois plus que celle qui la suit. Ceci est une singularité qui tient à l’expression de la phrase musicale. » (Demar, c.1797-1802, p. 8) 

 

Mais ces critères ne sont pas toujours limpides aux violonistes du XXIe siècle, et les exemples, comme les points de vue, sont multiples. Qu’on en juge plutôt avec ce florilège :

 

« Les petites [notes] n’ont aucune valeur et sont seulement des notes de goût qui sont presque toujours liées avec la note qui les suit […]. La règle générale est de les passer légerment, mais il est des cas où le goût exige que la petite note soit prolongés [sic], alors on emprunte sur la valeur de la note suivante, la mesure ne devant jamais être altérée. » (Lottin, c. 1803-1804, p. 16)

 

« Il faut donner la valeur aux petites notes, comme elle sont marquée. » (Martinn, c. 1807-1808, p. 22) 

 

 « Les petites notes d’agrément ne comptent pour rien dans la valeur de la mesure le tems qu’on met à les exécuter se prend sur la valeur de la note principale. » (Billiard, publication entre 1812 et 1825, p. 22) 

 

Fontaine, prolixe :

« Pour terminer ce chapitre, nous poserons en principe que la petite note et les groupes de petites notes doivent être exécutées d’après le caractère et le mouvement du morceau, elles doivent être lentes, nobles ou plaintives dans le Largo, l’Adagio, l’Andante et souvent dans l’Allegro moderato ; vives et légères dans le Rondo et le Presto […]. Le goût peut seul indiquer, ainsi que le caractère du morceau, si cette petite note doit être très brève, ou avoir une durée de la moitié de la valeur de la note qui suit. Les anciens assignaient généralement, à la petite note la moitié de la valeur de la note qu’elle précédait ; cependant, au commencement des phrases, ils la faisaient très-brève et ne la considéraient que comme préparant et facilitant la prise de la note réelle. » (Fontaine, 1837, p. 10)

 

« Les petites notes, ou appogiatures appelées aussi port-de-voix, sont des notes plus petites que les autres dont la valeur n’est pas comprise dans la mesure, on prend leur durée tantôt sur la note précédente, tantôt sur la note suivante ; par intervalles simples elles prennent ordinairement la moitié de la valeur de la note sur laquelle elles reposent, par intervalles composés elles s’exécutent brièvement. » (Bergerre, 1839, p. 54)

 

« De la petite note ou note d’agrément : La petite note est ajoutée et ne compte pas comme valeur dans la mesure (en général elle se fait vivement) dans les mouvements lents on la prendra sur la note dont elle est suivie il peut y avoir plusieurs notes d’agrément. » (Dubois, 1846, p. 30)

 

« L’Appogiature simple est une petite note sur laquelle on appuie la voix, et qui prend la moitié de la valeur de la grosse note qui suit, ou les deux tiers si cette note est pointée. » (Marque, 1852, p. 14)

 

« Les petites notes empruntent leur durée sur les notes avec lesquelles elles sont liées. » (Carnaud Jeune, c. 1879-1882, p. 4) 

 

Bien évidemment, le contexte stylistique d’un Demar, au tournant des XVIIIe et XIXe siècles, n’est en rien comparable à celui d’un pédagogue des années 1870. Si je place côte à côte ces citations s’échelonnant sur une longue période temporelle, c’est pour mettre en avant que l’évolution au cours du siècle n’est pas une marche uniforme et que les vues diverses ne sont pas fonction des époques. Il apparaît aussi clairement – c’est là une chose fondamentale – que les petites notes, même lorsqu’elles sont notées sur la partition, nécessitent dans leur exécution une connaissance de l’ordre de la tradition orale – le « goût » qu’évoquent Lottin ou Fontaine, et dont je parlerai plus loin.

 

Du trille

 

Dans le registre de la notation, le trille induit lui aussi d’emblée plusieurs questions. Faut-il le préparer, le terminer, et si oui, de quelle manière ? Faut-il le faire débuter par la note réelle11, par la note supérieure ou par la note inférieure ? Autant d’interrogations qui se posent, partie ou totalité, selon les précisions de la notation.

 

Je choisis ici de m’attacher uniquement au problème de la note de départ du trille. Je pose qu’un violoniste souhaite jouer le passage suivant, agrémenté d’un trille. Par quelle note faudra-t-il le commencer ?

 


	Alard, Grand duo pour piano et violon, 1851.

Alard, Grand duo pour piano et violon, 1851.

 

Alard traite certes du trille dans sa méthode, mais inscrit sur ses exemples une petite note qui indique que le trille doit débuter avec la note supérieure, note qui ne figure pas dans le passage précédent :

 


	Alard, 1844, p. 30.

Alard, 1844, p. 30.

 

Les autres auteurs sont-ils de quelque secours pour la réalisation d’une telle figure ? Beaucoup considèrent le trille sans mentionner la note sur laquelle il doit débuter. Parmi ceux qui en traitent, d’aucuns exigent qu’il se fasse par la note supérieure :

 

« Le battement de la note sur laquelle est pose [sic] le tremblement, se fait toujours avec le doigt supérieur à la dite note. » (Perrin, c. 1808-1810, p. 114)

 

« Le trille doit toujours commencer par la note supérieure à celle sur laquelle il est placé […]. » (Bergerre, 1839, p. 52)

 

D’autres nuancent, voire contredisent cette position. Demar exprime la sienne avec fermeté, nous exposant les cadences en usage qui commencent toutes deux par la note réelle :

 


	Demar, c. 1797-1802, p. 8.

Demar, c. 1797-1802, p. 8.

 

Chez Cadot également, le trille commence par la note réelle :

 


	Cadot, c. 1820, p. 8.

Cadot, c. 1820, p. 8.

 

Un exemple supplémentaire de cette pratique :

 


	Blanc, 1846, p. 64.

Blanc, 1846, p. 64.

 

Herman est prudent en précisant qu’« il [le trille] ne doit presque jamais commencer par la note sur laquelle il est marqué […] », ce qui laisse tout de même entendre que le trille par la note réelle existe et peut trouver sa place dans une interprétation.

 


	Herman, 1875, p. 44.

Herman, 1875, p. 44.

 

Certains pédagogues mentionnent aussi la possibilité de commencer le trille par la note inférieure :

 


	Fontaine, 1837, p. 9.

Fontaine, 1837, p. 9.

 

Voire, de le préparer avec plusieurs notes inférieures, comme le signalait déjà Baillot :

 


	Baillot, 1834, p. 78.

Baillot, 1834, p. 78.

 

Ici, plus tard, chez Bretonnière :

 


	Bretonnière, 1862, p. 24.

Bretonnière, 1862, p. 24.

 

Il faut noter que, chez maints auteurs, le signe tr du trille peut aussi représenter un mordant ou un gruppetto12 ; un violoniste rencontrant ce signe dans une partition du XIXe siècle aura donc à s’interroger sur l’exécution à en donner : trille, mordant ou gruppetto.

 

Par ailleurs, on aura remarqué que certaines méthodes recommandent d’augmenter le rythme des battements du trille au cours de sa réalisation. Cette pratique aujourd’hui disparue dans l’interprétation des œuvres du XIXe siècle semble être directement issue du siècle précédent. Toutefois, je trouve mention du trille à battements augmentés jusqu’en 187513 tandis que celui à battements réguliers est prescrit dès 183714.

 

Ces exemples mettent donc surtout en évidence que le contexte musical, encore une fois, est déterminant : les diverses vues exprimées sont moins le fait de divergences d’opinion que de contextes musicaux différents qui induisent des prescriptions spécifiques. Ces illustrations s’adressent aux lecteurs de l’époque – vraie difficulté pour nous qui en sommes éloignés ; sorties de leur contexte, elles perdent de leur évidence et nous sont plus difficiles à appréhender.

 

Terminologie

 

Au gré des extraits précédents, le lecteur aura aperçu ici ou là – tant pour ce qui concerne les petites notes que le trille – des termes employés dans une acception différente de celle qui leur est prêtée aujourd’hui. Le trille se désigne ainsi souvent par le mot tremblement ou cadence, bien que plusieurs auteurs de mon corpus, à l’instar de Baillot, Rode et Kreutzer15 ou de Habeneck16, précisent que ce dernier usage soit impropre. On aura noté la coquette expression de notes postiches employée par Demar pour désigner les petites notes (Demar, c. 1797-1802, p. 8) ; cet exemple des petites notes permet plus largement de mesurer l’étendue de l’attention à porter au vocabulaire employé dans ces méthodes.

 

Pour Blanc :

« Lorsque les petites notes sont réunies par deux, elles prennent le nom de Brisé, elles se font toujours coulées sur la grande note qui les suit. » (Blanc, 1846, p. 55) 

 

Tandis que pour Herman, le brisé s’apparente au gruppetto actuel :

 


	Herman, 1860, p. 20.

Herman, 1860, p. 20.

 

Mais chez Bergerre, le brisé, représenté par ce même signe de gruppetto, peut désigner, selon son placement sur la partition, trois petites notes à exécuter avant la note principale :

 


	Bergerre, 1839, p. 54.

Bergerre, 1839, p. 54.

 

L’expression port de voix, ou sa variante italienne portamento est également couramment utilisée pour désigner les petites notes17. En voici deux exemples parmi beaucoup :

 


	Bedard, c. 1798-1799, p. 8.

Bedard, c. 1798-1799, p. 8.

 

« La petite Note que l’on nomme aussi Note d’agrément ou port de voix se désigne par une Note plus petite que les autres, elle n’a aucune valeur et n’altère point la mesure. » (Dupierge, 1822, p. 26)

 

Cet emploi est sensiblement différent du sens de l’expression port de voix aujourd’hui, qui désigne un glissando plus ou moins accentué entre deux notes, pratique d’ailleurs très peu employée de nos jours, au regard de sa popularité au XIXe siècle, dont les présentes méthodes témoignent.

 

Mais on voit ici qu’à son tour, le mot portamento prend une signification déconcertante :

 


	Herman, 1875, p. 56.

Herman, 1875, p. 56.

 

… ce qui n’est évidemment pas ce que comprendrait un violoniste du XXIe siècle.

 

En marge de mon corpus, je ne résiste pas à reproduire la vision de Baillot qui mentionnait en 1834 deux manières de faire le port de voix, dont la première désarçonne le jugement contemporain :

 


	Baillot, 1834, p. 75.

Baillot, 1834, p. 75.

 

Ces exemples ne prétendent à aucune exhaustivité ; ils soulignent quelques-unes des difficultés que je rencontre, violon en main, dans ma lecture contemporaine des œuvres du XIXe siècle.

 

Pour prolonger l’exemple de Baillot, et pour clore en accroissant toujours l’étonnement contemporain, je lui emprunte le cas extrême qu’il nous soumet, en classant le terme Agitato dans la catégorie de caractère « Vague. Indécis » et Con fuoco au sein du caractère « Calme. Religieux » (Baillot, 1834, p. 195) ! À quel musicien de notre temps viendrait donc à l’esprit l’idée de jouer religieusement un mouvement intitulé Con fuoco ?

 

Polysémie du signe

 

Comme le sens des mots, dont on a vu qu’il fallait l’envisager en fonction de l’époque, la signification des signes a une importance capitale, en ce qu’elle emprunte souvent des tournures inattendues. Bien sûr, on en trouve qui prennent, selon les auteurs, la même acception que nous leur attribuons de nos jours. Les deux passages suivants ne comportent ainsi pas de surprise manifeste :

 

« Pour faire les notes sur lesquelles on met des points et qu’on appelle piquées, il faut les séparer par un petit silence et appuyer un peu l’index sur l’archet en attaquant la note, soit en tirant, soit en poussant. » (Gasse, 1834, p. 35)

 

« Le Spiccato ou piqué se marque par des points ronds au-dessus des notes ; ils indiquent de ne soutenir les notes que la moitié de leur valeur et de les compléter par un silence pris sur cette même valeur. » (Marque, 1852, p. 11)

 

Mais les signes prennent parfois des airs captieux pour le musicien de notre temps. On voit dans les extraits ci-dessous qu’un même signe est loin d’avoir toujours la même signification, que ce soit à une même période temporelle ou à des époques éloignées. Ici le martelé est représenté par des points, non par le signe que nous lui connaissons aujourd’hui, chez Guichard comme chez de nombreux auteurs :

 


	Guichard, 1851, p. 102.

Guichard, 1851, p. 102.

 

Tandis que chez Guichard toujours, il peut aussi signifier un détaché léger, soit un coup d’archet au caractère à peu près opposé :

 


	Guichard, 1851, p. 103.

Guichard, 1851, p. 103.

 

Chez Herman, outre un martelé, le point indique cette fois un coup d’archet à la corde :

 


	Herman, 1860, p. 52.

Herman, 1860, p. 52.

 

Mais à l’inverse, un coup d’archet imperceptiblement sauté peut n’être désigné par aucun signe :

 


	Herman, 1860, p. 69.

Herman, 1860, p. 69.

 

Par ailleurs, le signe martelé actuel peut à son tour prendre un sens qui n’est pas celui que nous lui donnons aujourd’hui. Ici chez Baillot, il représente un coup d’archet qui doit se faire avec légèreté, bien loin de nos réflexes actuels inhérents à ce signe :

 


	Baillot, 1835, p. 98

Baillot, 1835, p. 98

 

Au début du siècle, on rencontre chez Lottin un exemple encore beaucoup plus surprenant, où les points ont une signification de liaison (Lottin, c. 1803-1804, p. 4) :

 


	Lottin, c. 1803-1804, p. 4

Lottin, c. 1803-1804, p. 4

 

Ici encore, quel violoniste penserait de nos jours que des points sur les notes puissent spécifier une liaison ? Quatre croches surmontées de points n’attirent nullement l’attention, or c’est bien là une représentation qui donne lieu à interrogation.

 

Au-delà du signe

 

J’ai déjà évoqué la connaissance décisive de la tradition orale pour la bonne réalisation de force signes indiqués sur la partition. Cette référence intervient dès la lecture, ce dont bien peu d’interprètes d’aujourd’hui sont conscients. Mais au détour de certaines méthodes, quand leurs auteurs nous livrent quelques éléments qui échappent aux figures de la notation et dont la partition ne porte nulle trace, c’est toute l’étendue des traditions d’interprétation non écrites qu’on entrevoit.

 

Guichard est ainsi particulièrement disert sur cette question de la notation et propose plusieurs exemples éloquents :

 

« Sans doute, l’expression est aussi bien que possible indiquée par des signes, dans les œuvres des bons auteurs ; mais il est bien des nuances qui échappent à la puissance des signes et qui dès lors sont abandonnées au talent, au goût à la sensibilité ou à l’énergie du musicien exécutant. » (Guichard, 1851, p. 151)

 

Déjà, la méthode de Baillot, Rode et Kreutzer indiquait au sujet des petites notes que « cet agrément ne se marque point ; c’est à l’exécutant à le placer avec goût. » (Baillot, Rode, Kreutzer, 1803, p. 125)

 

Baillot, dans sa propre méthode, détaillait ensuite par le menu, pendant dix pages, toutes les catégories d’accents, avec des exemples empruntés au répertoire, pour finalement tirer les conclusions suivantes :

 

« 1° Que les uns [les accents] ne sont indiqués par aucun signe.

2° Que d’autres ne le sont qu’imparfaitement. » (Baillot, 1834, p. 204)

 

Dans cet exemple enfin, sur la deuxième portée, la première ligne ne comporte aucun signe pour signaler les silences que requiert Guichard entre les notes. L’exécution d’un tel passage est donc différente de sa notation, sans que rien ne l’indique :

 


	Guichard, 1851, p. 106

Guichard, 1851, p. 106

 

Il en va de même pour les nuances :

« Il est des nuances dont le goût à [sic] consacré l’usage et qui étant devenues des règles, ne sont pas toujours écrites. » (Guichard, 1851, p. 105)

 

Ou les accents :

« Quelquefois, la première note, dans un passage en triolet, se fait un peu plus fortement sentir que les deux autres ; mais il est des cas où cette manière d’accentuer serait d’un très mauvais goût. » (Guichard, 1851, p. 105)

 

Ces deux dernières citations synthétisent par ailleurs la récurrence de l’allusion au goût18 auquel appellent si souvent les compositeurs des méthodes. Cette notion de goût embarrasse grandement l’interprète de notre époque, qui n’a pas les clés indispensables à le discerner et à l’appliquer. Car c’est du bon goût qu’il est essentiel de faire usage, puisqu’aucun auteur ne se réclame évidemment du mauvais goût…

 

Je cite à ce sujet quelques lignes tirées d’un écrit publié en 1900, qui me semblent en dire long :

 

« Évidemment l’on ne peut plus guère jouer en public les concertos de Viotti, de Kreutzer, de Rode, de Lafont, de Baillot, pas plus que ceux de Mestrino, de Libon, de Jarnowick et de toute cette pléiade de violonistes de la même époque, dont la fécondité était extrême, mais dont le savoir harmonique était à peu près nul. » (Chabert, 1900, p. 97)

 

Quoi de plus fluctuant et fragile que le goût, en effet, fonction des époques et d’un faisceau complexe de paradigmes ? L’idée d’évolution revient ici en force. L’exemple des méthodes d’Herman est frappant. Il publie en 1860 une Méthode complète de violon op. 40 puis en 1875 une Petite méthode pratique pour le violon op. 40bis, sorte d’abrégé de la première, en grande partie reprise de cette Méthode complète, mais dont certains articles disparaissent ou changent. Ainsi, le « coup d’archet léger » (Herman, 1860, p. 50) est évincé par le « coup d’archet sautillé ou perlé » (Herman, 1875, p. 52), dont la définition est pourtant parfaitement similaire. On voit également apparaître dans le second traité une « ondulation produite simultanément par le mouvement de l’archet et par le mouvement du doigt » (p. 44) quand le premier ne mentionnait qu’une « ondulation produite par la main gauche » (p. 48).

 

En matière de goût, pendant la première moitié du siècle essentiellement, les auteurs ne manquent presque jamais de se référer à Jean-Jacques Rousseau. Son esthétique parcourt en filigrane leurs réflexions. D’autre part, les auteurs placent d’emblée leur vision violonistique sous le signe de la vocalité ; les parallèles sont innombrables dans l’ensemble du corpus. Il est donc aussi capital de garder à l’esprit cet angle de vue, imprimé si profond et si unanimement chez les musiciens de l’époque.

 

Une diversité au service de l’interprétation

 

Lespages précédentes auront dévoilé quelques-unes des indications livrées par ce riche corpus de méthodes pédagogiques de violon ; elles auront surtout révélé, par-delà ces éléments, la source fondamentale qu’il constitue, au profit du chercheur et a fortiori de l’interprète, pour la connaissance de l’interprétation violonistique au XIXe siècle.

 

Certaines pratiques de jeu présentées rejoignent des vues déjà connues, d’autres viennent bousculer des doxas bien ancrées, mais la diversité représentée au sein de ces traités soulève surtout maintes interrogations, loin de théories acquises à la certitude. La curiosité se fait nécessité de mobiliser d’autres sources, tels les méthodesde chant et d’autres instruments ou les articles de presse, pour procéder à un croisement aussi riche que possible des informations. Comment par exemple ne pas rapprocher la tenue prescrite du bras droit, collé au corps, avec l’étiquette générale de la bonne tenue en société au XIXe siècle 19?

 

L’attention à porter à la notation est essentielle, cependant même que l’utilisation des signes ne fait l’objet d’aucune uniformisation et que la tradition orale joue un rôle capital dans leur réalisation. L’accent est mis sur l’importance du contexte pour appréhender les indications des auteurs, chaque ouvrage étant étroitement lié à son époque. Des usages du XVIIIe siècle perdurent au siècle suivant – usages que les auteurs ne prennent néanmoins que rarement la peine d’expliquer, attendu qu’ils sont du ressort de l’évidence. Quiconque a jamais vécu l’expérience d’une répétition d’orchestre, de nos jours, peut mesurer le poids de cette oralité ; aujourd’hui comme au XIXe siècle, quantité des usages et des composantes d’une interprétation ne sont pas notées sur la partition.

 

Mes recherches soulignent que ces traditions, bien réelles20, s’ajoutent à différents courants, et c’est donc la coexistence de ces pratiques, dans toute leur diversité et à l’image de cette collection de méthodes, qu’il faut envisager pour appréhender l’interprétation des œuvres pour violon du XIXe siècle. Le musicien d’aujourd’hui saura, j’en suis persuadée, faire un usage fécond de la contribution de ce corpus à la connaissance du patrimoine violonistique français, pour nourrir à son tour ses interprétations des pièces de cette époque.

Bibliographie

Les titres des ouvrages sont donnés dans leur orthographe originale, parfois fautive.

Les cotes indiquées sont celles des documents conservés par la Bibliothèque nationale de France (BnF) à Paris.

 

ALARD D.

École du violon. Méthode complète et progressive à l’usage du conservatoire, 1844, Paris, Schonenberger ; Mayence, B. Schott, Vm8c.18

 

ALDAY fils

Grande méthode élémentaire pour le violon dédiée à leur père et composée par les fils Alday, publication entre 1821 et 1833, Lyon, Arnaud, Vm8c.21

 

BAILLOT P. M. F. de S.

L’Art du violon. Nouvelle méthode dédiée à ses élèves, sans date = 1834, Paris, Imprimerie du Conservatoire de Musique, Vm8c.24

 

BAILLOT P. M. F. de S., RODE, P. et KREUTZER, R.

Méthode de violon par MM. Baillot, Rode et Kreutzer, membre du Conservatoire Royal de Musique, rédigée par Baillot, adoptée par le Conservatoire pour servir à l’étude dans cet établissement, sans date = 1803, Paris, Le Roy, Vma.2547(3) (reproduction fac-similé)

 

BERGERRE A.

Nouvelle méthode pour le violon ou recueil de leçons avec les observations nécessaires pour apprendre à bien jouer de cet instrument dédiée à Monsieur Lottin père par Alexandre Bergerre professeur, membre de plusieurs sociétés savantes, op. 46, 1839, Paris, Cotelle ; Orléans, Loddé, Vm8c.27

 

BÉRIOT C. A.

Méthode de violon divisée en trois parties, op. 102, 1857, Paris, l’auteur, Vm8c.28

 

BILLIARD J. P.

Méthode de violon par J.P. Billiard adoptée pour MM. Les Pages de la musique du roi, sans date = publication entre 1812 et 1825, Paris, Naderman, Vm8c.31

 

BLANC J.

Grande méthode complète et raisonnée pour le violon composée sur un plan nouveau et servant d’introduction à celle du conservatoire, par J. Blanc, 1846, Paris, Alex Grus aîné, Vm8c.32

 

BRETONNIÈRE V.

Méthode théorique et pratique pour le violon contenant principes de musique leçons préparatoires tablatures études suivis d’airs extraits des opéras de nos grands maitres, et terminés par des études extraites des œuvres de Dancla par V. Bretonnière, op. 224, 1862, Paris, Léon Escudier, Vm8c.35

 

CADOT C.

Méthode élémentaire pour le violon contenant les principes de la musique et la tenue du violon ainsi que les gammes et leçons nécessaires pour parvenir aux difficultés, sans date = c. 1820, Paris, Lahanier, Vm8c.37

 

CARNAUD Jeune

Méthode pour le violon analytique et progressive, sans date = c. 1879-1882, Paris, A. Provost et Cie, Vm8c.156

 

CORNETTE V.

Méthode de violon, 1855, Paris, Colombier, Vm8c.44

 

BEDARD J. B.

Nouvelle méthode de violon courte et intelligible précédée d’un abbrégé des connaissances essentielles de la musique en général et suivie de douze petits airs de différents opéra avec l’indication de manière de tirer et de pousser l’archet à propos, par Bedard, artiste du Théâtre de la République, c. 1798-1799, Paris, Vogt, L.9293

 

DEMAR S.

Méthode abrégée pour le violon faite d’une manière très facile, avec tous les principes indispensables pour jouer de cet instrument par Sébastien Demar, sans date = c. 1797-1802, Paris, Imbault, Vm8c.14

 

DEPAS E.

Méthode élémentaire pour violon adoptée par les premiers professeurs et à l’usage des collèges et pensionnats par Ernest Depas, 1865, Paris, Alphonse Leduc, Vm8c.50

 

DUBOIS C.

Méthode complète et élémentaire pour le violon servant d’introduction à celles des conservatoires de France, d’Allemagne et d’Italie. Par C. Dubois d’après Kreutzer et Viotti, 1846, Paris, N. Paté, Vm8c.57

 

FONTAINE A.

Méthode élémentaire et progressive de violon contenant l’Abrégé des principes de musique, une théorie nouvelle pour l’archet, des Gammes et études propres à former l’intonation des élèves, à les familiariser avec les distances difficiles sur le violon, et à leur faciliter le mécanisme de l’archet, un choix d’airs nouveaux tirés des opéras de Bellini ; Meyerbeer, Rossini, &c avec accompt d’un second violon ad-lib. Composée et dédiée à son Cousin L. Fontaine, ex-artiste de l’Op. Comique par A. Fontaine, 1837, Paris, Meissonnier, Vm8c.61, L.11.303, L.9.104 (similaires)

 

GASSE F.

Méthode de violon d’après les principes du conservatoire et servant d’Introduction à la méthode publiée par cet établissement Composée par F. Gasse artiste de l’académie royale de musique, 1834, Paris, J. Meissonnier, L.9135, Vm8c.62

 

GUICHARD M.

École du violon. Grande méthode complète et raisonnée pour le violon à l’usage du Conservatoire par M. Guichard ex 1er violon du Théâtre Italien, 1851, Paris, Mce Schlesinger, L.9.290

 

GUHR K.

L’art de jouer du violon de Paganini, appendice à toutes les méthodes qui ont paru jusqu’à présent, avec un traité des sons harmoniques simples et doubles ; ouvrage dédié aux grands maitres Rode, Kreutzer, Baillot, Spohr par Charles Guhr, directeur et chef d’orchestre du théâtre de Francfort, 1830 pour la traduction française (1829, Mayence), Paris, les fils de B. Schott, Vm8c.63

 

HABENECK F. A.

Méthode théorique et pratique du violon, précédée des principes de musique et quelques notes en facsimile de l’écriture de Viotti, 1842, Paris, Canaux, Vm8c.65

 

HERMAN A.

Méthode complète de violon, op. 40, 1860, Paris, Girod, Vm8c.63

Petite méthode pratique pour le violon, op. 40 bis,1875, Paris, Lemoine, Vm8c.67

 

KAUDELKA V.

Méthode de violon contenant 75 leçons, 38 duos progressifs et 42 variations sur la gamme en La mineur, destinée aux jeunes élèves Par Vr. Kaudelka, sans date, Paris, l’auteur, Vm8c.74

 

KLEIN A.

Méthode de violon, contenant les principes de la musique, l’enseignement clair et succint de la tenue de violon, les premières notions de cet instrument, la connaissance du manche et les différentes positions, des exercices élémentaires classés progressivement, rédigée par A. Klein d’après Eugène Roy, sans date = c. 1835-1838, Paris, Petit, D.10.855

 

LOTTIN D.

Principes élémentaires de musique et de violon à l’usage des commençans, sans date = c. 1803-1804, Paris, Leduc, L.9.072

 

MARQUE A.

Nouvelle méthode pour le violon composée par Marque op : 20 contenant : les principes de musique très complets, un tableau de transposition, 24 leçons de solfège et vocalises, les gammes dans tous les tons majeurs et mineurs et tous les intervalles diatoniques. Exercices élémentaires sur toutes les positions et dans tous les tons, 30 duos en trois catégories, petits morceaux d’agréments sur tous les genres de musique. Etudes sur les trilles, grouppes, cadences et sur le staccato. Coups d’archets détachés, piqués, coulés, syncopés, martelés et arpégés. Grandes études et caprices très compliqués suivis d’une ouverture en duo et d’un trio pour deux violons et basse, 1852, Paris, Lafleur ; Carnaud Jeune, Vm8c.81

 

MARTINN J. J. B.

Méthode élémentaire pour le violon adoptée par le lycée Impérial contenant les principes de la musique, la manière de tenir le violon, toutes les gammes, 24 leçons, six airs variés et six duos,sans date = c. 1807-1808, Paris, Magasin de musique, Vm8c.83

Méthode de violon avec exercices et gammes dans tous les tons, suivis de 25 leçons et 2 divertissements, sans date = c. 1810, Paris, Jouve, Vm8c.84

 

MAZAS J. F.

Méthode de violon, suivie d’un traité des sons harmoniques en simple et double cordes, op. 34, sans date = 1830, Paris, Aulagnier, Vm8c.86

 

PERRIN J. D.

Leçons élémentaires et progressives à l’usage de ceux qui veulent apprendre à jouer du violon composées et dédiées à Messieurs Grétry et Dalayrac Par J.D. Perrin musicien et professeur de violon au lycée impérial, sans date = c. 1808-1810, Paris, P. et J.J Le Duc, Vm8c.125, Vm8c.124

 

ROGER A.

Méthode de violon contenant les principes de musique, la manière de placer les doigts sur la touche du violon, avec la division du manche ; des gammes aux positions ; des leçons pour l’exercice des doigts et de l’archet, suivis d’airs nouveaux par A. Roger Professeur, 1841, Paris, Joly, Vm8c.131

 

ROY C. E.

Méthode de violon revue, corrigée et augmentée de plusieurs airs nouveaux par Carnaud Jne, sans date = c. 1841, Paris, Lenglart, Vm8c.39

Nouvelle méthode de violon élémentaire et pratique revue et augmentée par J. Javelot, 1884, Paris, Le Bailly, Vm8c.105, L.8900

 

STOWELL R.

Violin Technique and Performance Practice in the Late Eighteen and Early Nineteenth Centuries, 1985, Cambridge, Cambridge University Press.

 

TURBRI F. L. H.

Méthode sentimentale pour le violon, sans date, Paris, l’auteur, L.8911

 

WIRSTA A.

L’enseignement du violon au XIXe siècle, thèse pour le doctorat ès-lettres présentée à la Faculté des lettres et Sciences Humaines de l’Université de Paris, 1971, Paris.

Notes

1 Il faut préciser cependant que la majorité des auteurs sont des « professionnels », pour employer un terme anachronique, c’est-à-dire engagés comme violonistes dans des orchestres constitués, la page de titre précisant souvent l’institutionà laquelle ils appartiennent(par exemple, au diapason des bouleversements politiques : « Artiste du Théâtre de la République » pour Bedard, « Artiste de la Chapelle » pour Corret Ainé, ou encore « Artiste de l’Opéra Royal et de l’Opéra Comique » pour Dupièrge).

2 Woldemar, Habeneck, Alard, notamment.

3 Toutes les citations de cet article conserveront l’orthographe ainsi que la ponctuation originales, parfois fautives, des auteurs.

4 L’ensemble des citations de ce corpus ainsi que toutes les illustrations reproduites ont pour source le Département de la musique de la Bibliothèque nationale de France (cf. cote des ouvrages dans la bibliographie).

5 Bretonnière, Perrin, Depas, Gasse, Fontaine, parmi d’autres.

6 Rappelons que cette méthode, rédigée par Baillot, fut « adoptée par le Conservatoire », alors sous la direction de son fondateur Sarette, « pour servir à l’étude dans cet établissement » le 5 ventôse an 10, soit le 24 février 1802, et fit de ce fait autorité pendant plusieurs décennies.

7 La seule exception, parmi les méthodes étudiées à ce jour, se trouvant dans l’ouvrage de Bretonnière (Bretonnière, 1862, p. 12), dont l’illustration de la tenue du corps diverge, tandis que le texte est conforme à la description habituelle, très inspiré de la méthode de Baillot, Rode et Kreutzer.

8 Cette position exige en effet que la main gauche prenne appui sur le violon à la troisième position, pratique proscrite aujourd’hui, sur laquelle sont d’accord tous les auteurs de mon corpus qui en font mention.

9Chez Fontaine, Guichard et Cornette, par exemple.

10 Le coude levé est d’ailleurs l’un des aspects saisissants de la posture de Paganini, position qu’il n’adopte cependant que « dans les accords qu’on attaque vigoureusement avec la partie inférieure de l’archet, près de la hausse », d’après le récit de Karl Guhr dans sa méthode consacrée au virtuose, mais qui frappe ses contemporains par sa nouveauté (Guhr, 1830, p. 4).

11 Je désigne par « note réelle » la note sur laquelle le trille est écrit.

12 Selon notre acception actuelle de ce terme. Par exemple chez Habeneck (Habeneck, 1842, p. 111).

13 Dans la méthode d’Herman qui précise que « le trille placé à la suite d’un trait, produit plus d’effet en prenant une vitesse progressive. » (Herman, 1875, p. 45)

14 Dans la méthode de Fontaine (Fontaine, 1837, p. 9).

15 « Le Trille, appellé improprement Cadence, parce qu’on le place sur les cadences harmoniques […] » (Baillot, Rode, Kreutzer, 1803, p. 126)

16 « Article III. Sur le trille appelé improprement cadence », à quoi Habeneck ajoute la note suivante : « Le nom de cadence qu’on donne au trille lui vient de ce que la note qui précède le repos final d’une période et qu’on appelle cadence en est souvent affectée. » (Habeneck, 1842, p. 111)

17 La méthode de Baillot, Rode et Kreutzer nous le signalait déjà : « Les compositeurs employent quelque fois la petite note pour indiquer le Portamento, ou Port de voix. » (Baillot, Rode, Kreutzer, 1803, p. 125)

18 À ce titre, le nom de notes de goût donné par Lottin, comme beaucoup d’autres, aux petites notes (cf. le paragraphe qui leur est consacré) est déjà révélateur (Lottin, c. 1803-1804, p. 6).

19 Ce sont alors les ouvrages de dramaturgie qui précisent la signification d’un bras décollé du corps, posture d’une force toute particulière, exprimant un sentiment fort, fureur par exemple – geste proscrit en dehors de la scène. Cette réflexion rejoint la description toujours faite par les auteurs de mon corpus, qui insistent sur le caractère noble et gracieux de l’attitude à observer dans le maintien violonistique.

20 Faut-il rappeler, à titre d’exemple, que Pierre Baillot et son fils René-Paul sont à eux deux présents pendant près d’un siècle au Conservatoire de Paris ?

Pour citer ce document

Cécile Kubik, «Des méthodes pédagogiques inédites comme contribution à la connaissance interprétative du XIXe siècle violonistique français», La Revue du Conservatoire [En ligne], Actualité de la recherche au Conservatoire, La revue du Conservatoire, Le deuxième numéro, mis à jour le : 24/06/2013, URL : https://larevue.conservatoiredeparis.fr:443/index.php?id=713.

Quelques mots à propos de :  Cécile Kubik

Interprète et chercheuse, la violoniste Cécile Kubik occupe une place singulière parmi les musiciens français. Elle est invitée par de nombreuses phalanges, telles que l’Orchestre philharmonique de Radio France, ou, en qualité de super soliste et de violon solo, l’Orchestre National de Lorraine et l’ensemble Court-Circuit. Elle prépare un doctorat de musique Recherche et pratiqueau Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris et à l’Université Paris-Sorbonne et rédige une thèse intitulée Penser l’interprétation des sonates françaises pour piano et violon au XIXe siècle, aux côtés de Jean-Pierre Bartoli et de Christophe Coin. Cécile Kubik consacre de nombreux récitals, sur instruments anciens comme modernes, au répertoire délaissé qu’elle découvre lors de ses recherches doctorales (Cité de la musique/Musée de la musique, Invalides…). Membre du groupe de recherche Patrimoines et langages musicaux (Université Paris-Sorbonne), elle est l’auteure d’articles et est invitée à donner des conférences dans des colloques internationaux. Titulaire d’un Master de soliste, mention très bien, elle a étudié à Paris et Rotterdam auprès de Miroslav Roussine, Jean-Jacques Kantorow et Gordan Nikolić. Cécile Kubik est soutenue par le Mécénat musical Société Générale, la Fondation Meyer et le Centre international Nadia et Lili Boulanger. Son premier enregistrement, aux côtés de la pianofortiste Yoko Kaneko, dans la collection Jeunes Solistes soutenue par la Fondation Meyer, est consacré aux sonates pour piano et violon méconnues de Baillot, d’Alkan et d’Alard.