Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris
n°7
Dominique Escande

Colloque Roland-Manuel (novembre 2016) | De l’Institut hydrothérapique à Isabelle et Pantalon

Article
  • Résumé
  • Abstract

Le projet d’Isabelle et Pantalon, opéra-bouffe en deux actes de Roland-Manuel sur un livret de Max Jacob, se décline en quatre étapes distinctes : une première phase d’élaboration en 1918 en collaboration avec Jane Bathori ; la création d’extraits en concert en 1921-1922 ; la création de l’opéra-comique en décembre 1922 au Théâtre du Trianon-Lyrique en décembre 1922 ; et la reprise à l’Opéra-Comique en 1959 pour deux représentations. Quelle fut la collaboration entre Roland-Manuel et Max Jacob, affirmant que « le fond de mon ventre est opéra-comique » ? Comment Max Jacob et Roland-Manuel se sont-ils emparés des genres traditionnels que sont l’opéra-comique et la commedia dell’arte ? Quels ont été leurs choix artistiques (rôle du chœur, décors, mise en scène, interprètes) et quelle fut la réception dans la presse des productions de 1922 et 1959 ?

Texte intégral

Au regard des Mamelles de Tirésias de Poulenc, de Parade de Satie, des Mariés de la Tour Eiffel, ou encore du Dit des jeux du monde de Honegger qui fait scandale le 2 décembre 1918 au Théâtre du Vieux-Colombier, Isabelle et Pantalon, opéra bouffe1 en deux actes de Roland-Manuel (1891-1966) sur un livret de Max Jacob (1876-1944), créé à Paris, le 112 décembre 1922, au Trianon-Lyrique3, fait presque figure d’œuvre « rétrograde ».

Si le critique Maurice Bex salue « un opéra bouffe très réussi », qui « ressuscite pour la joie générale, les personnages éternellement sympathiques de la comédie italienne », au « ton jamais forcé », « léger, souvent plaisant et toujours aimable »4, Georges Auric écrit : « Isabelle et Pantalon, et cela frappe dès qu’on entrouvre la partition, dès qu’on en scrute les intentions, les tendances, ne veut pas se prêter un instant à l’équivoque du « modernisme »5. »

Par son sujet revenant à la commedia dell’arte et sa première phase de gestation, en 1918, en marge de la saison musicale programmée par Jane Bathori au Vieux-Colombier, Isabelle et Pantalon a peut-être été influencé par la réforme du théâtre de Jacques Copeau. L’élaboration, la création et la reprise d’Isabelle et Pantalon se déclinent en quatre étapes distinctes (cf. tableau chronologique du projet en fin d’article) : une première phase d’élaboration en 1918 en collaboration avec Jane Bathori (1877-1970) ; la création au concert d’extraits en 1921-1922 ; la création de l’opéra-comique en décembre 1922 au Théâtre du Trianon-Lyrique en décembre 19226 et la reprise à l’Opéra-Comique en 19597 pour deux représentations.

 

 

Un premier projet en collaboration avec Jane Bathori

 

Un temps accompagnateur au piano, Max Jacob fréquente le cercle des Apaches où il croise Roland-Manuel, de quinze ans son cadet, dont il fréquente également le salon8. Leur belle amitié s’est sans doute cristallisée autour d’Eugène Roux, père de Suzanne Roux9 devenue l’épouse de Roland-Manuel en 1916. Au ministère de l’Agriculture, Eugène Roux dirigeait le service des fraudes et son laboratoire central, dont Max Jacob allait retenir le titre de l’une de ses œuvres phares, contemporaine de l’élaboration d’Isabelle et Pantalon : Le laboratoire central10 publié en 1921.

La première mention d’Isabelle et Pantalon apparaît dans une lettre de Max Jacob à André Salmon de novembre 1918 : « Je fais jouer un opéra le mois prochain avec Honegger11 et je termine un opéra-comique avec Roland-Manuel… et la peinture ne se fait et ne se vend plus du coup12. » Le poète, pour qui « le fond de mon ventre est opéra-comique13 », apprécie ce « mélange de cliché romance et des réalités quotidiennes ». Depuis sa jeunesse, il fredonne des airs d’opéra-comique (le Barbier de Séville mais aussi Offenbach, Rossini, etc.)14 en travaillant. En décembre 1903, Max Jacob passait fréquemment ses soirées au Trianon-Lyrique, dessinant les acteurs sur un carnet de croquis15.

Aux premières loges de la création de Pelléas et Mélisande de Debussy en 1902, Roland-Manuel s’est passionné pour L’Heure espagnole16 de Ravel et a acquis une maîtrise de la forme et du style de l’opéra-comique. Le choix d’emprunter le sujet à la commedia dell’arte a sans doute été décidé d’un commun accord entre Max Jacob, Roland-Manuel et Jane Bathori, investie dès les débuts du projet. Un dessin d’Arlequin et un dessin de Pierrot figurent respectivement sur les éditions du Cornet à dés17 et du Phanérogame18 de Max Jacob.

Une lettre non datée de Max Jacob à Roland-Manuel19 mentionne une lecture du texte, initialement intitulé L’Institut hydrothérapique : « Je lis L’Institut hydrothérapique à cinq heures et demie à Angèle Bathori20 (madame Angèle). Voici deux chansons. Tu m’as demandé aussi un air pour Bartholo. Je le ferai bientôt. »

Roland-Manuel collabore aux deux saisons musicales programmées à partir du 25 novembre 1917 par Jane Bathori au Théâtre du Vieux-Clombier21 où sont donnés notamment les trois Quatuors vocaux de Maurice Ravel. Le nom de Roland-Manuel apparaît dans le programme du « Concert de musique d’avant-garde » du 11 décembre 1917, parmi des œuvres de Georges Auric, Louis Duré, Germaine Tailleferre, Arthur Honegger, et la première de Rhapsodie nègre de Francis Poulenc. L’Hommage funèbre22 de Roland-Manuel est donné le 24 décembre 1917, avec M. Meyer au piano23.

En programmant au Vieux-Colombier des œuvres telles que Le Dit des jeux du monde d’Arthur Honegger, Une éducation manquée d’Emmanuel Chabrier ou La Servante maîtresse de Pergolèse, Jane Bathori a-t-elle songé à y donner Isabelle et Pantalon ? Cette hypothèse est d’autant plus probable que Max Jacob était l’auteur du livret de La Mort de sainte Alméenne (musique d’Honegger) également programmé au Théâtre du Vieux-Colombier.

Cette hypothèse se pose également car le sujet d’Isabelle et Pantalon fait écho au retour à la commedia dell’arte prôné par Jacques Copeau au Théâtre du Vieux-Colombier, et à la programmation de pièces parodiant la médecine telles que L’Amour médecin, Le Médecin malgré lui ou Le Malade imaginaire. Le livret de Max Jacob est un prétexte, c’est une histoire de la commedia dell’arte avec tous les personnages habituels de la comédie italienne. En deux mots, avec une sorte d’imbroglio avec Pantalon dupé, dont l’amour sort vainqueur en la personne d’Isabelle et Arlequin, après mille péripéties.

La parodie de la médecine qui se joue à travers le personnage du docteur Pantalon (basse bouffe) et du chœur des malades renvoie au propre vécu de Max Jacob, alors patient du neurologue Jean-Martin Charcot. Ainsi les didascalies du début de la Scène et Chœur des malades où Max Jacob fait dire à Pantalon : « N’êtes-vous pas soignés par un médecin qui coûte très cher24 ? »et à la fin du chœur des malades : « La consultation est terminée. Diète aujourd’hui pour tout le monde. Douche générale à quatre heures25. »Tout au long du livret, Max Jacob prend un malin plaisir à se moquer de la médecine « générale ».            

La mention d’un traitement par hydrothérapie prend un relief particulier au regard des problèmes d’alcoolisme de Max Jacob, comme en témoignent ces paroles de l’Air de Pantalon à l’acte 1 : « C’est la guérison nouvelle, L’eau ! Méthode universelle, Anéantit la douleur et enrichit le docteur. Recommandé aux familles, supprime cachets, pastilles, sirops, juleps26, ces liqueurs qui font toujours mal au cœur27

Le critique Maurice Bex souligne un décalage texte-musique : « la spontanéité subsiste dans les mots plus que dans la musique. Parfois, on souhaiterait que l’idée littéraire eut été relue puis corrigée, et que la phrase musicale, au contraire, n’ait pas été ciselée avec un soin aussi constant. Mais à ce décalage près, on ne se lasse pas d’admirer les recherches de timbres, d’écriture et d’élégance qui donnent un ton précieux à cette partition28. »

La mention, dans une lettre du 18 décembre 1918 de Max Jacob à André Salmon, de coupures et d’ajoutures illustre l’idée d’un état de « work in progress » : « J’avais rendez-vous avec Madame Bathori et Roland-Manuel à 11 heures pour des ajoutures, des coupures et des réglages. Je me suis aperçu à deux heures que nous n’avions pas déjeuné. Nous voulions profiter de cette chose rare : un rendez-vous où les trois intéressés sont présents29. »

S’il n’est plus possible d’identifier ces « coupures et ajoutures », la forme éditée de l’opéra bouffe répond aux conventions du genre avec une sinfonia d’ouverture (vif-lent-vif), deux actes clairement délimités par deux finales (quatuor pour l’acte 1 et quatuor + quintette final pour l’acte 2), une présence importante et structurante, outre son effet comique, du chœur des malades intervenant dès le lever de rideau ; des airs de solistes confiés aux rôles principaux : Pantalon, Isabelle et Zerbinette au premier acte ; Romance de Pierrot et Sérénade d’Arlequin au deuxième acte.

On note la présence intéressante, au regard du ballet Pulcinella de Stravinsky, composé en 1919, d’une Danse d’Arlequin30 (Presto) avant le final de l’acte I et de l’Entrée d’Arlequin31 (Maestoso, instrumental) de l’acte II, sans doute dansée. Outre l’admiration que Roland-Manuel portait à Stravinsky et sa collaboration à la rédaction de la Poétique musicale, il rédigea une critique de Pulcinella qui toucha particulièrement le compositeur russe32.

L’éventuel projet de faire représenter Isabelle et Pantalon au Théâtre du Vieux-Colombier a peut-être été abandonné en raison des bombardements de Paris et du bilan financier désastreux du théâtre. Mais il est également possible que Jane Bathori ait reçu Roland-Manuel et Max Jacob chez elle où elle enseignait33 ou, pour des raisons d’espace, au théâtre, sans avoir envisagé de programmer l’opéra bouffe. Jane Bathori était-elle la première interprète envisagée du rôle d’Isabelle ? La question reste ouverte.

À l’époque de la lecture de L’Institut hydrothérapique34 (lieu de déroulement de l’opéra mentionné sur la page de distribution des rôles de la partition pour piano-chant : « La scène se passe à Venise à une époque indéterminée, dans le jardin de l’Institut hydrothérapique du docteur Pantalon35. »), le titre définitif de l’opéra bouffe est encore en discussion, comme l’exprime Max Jacob : « Ce titre pour insister sur le sujet de notre pièce qu’on oublie trop dans le flot montant de ton admirable musique. Je trouve le titre que tu proposes un peu trop ‘velours de Gênes et popeline de soie’, étoffes me semblant vues déjà au théâtre de Mr. Georges Berr36 et somme toute correspondant peu à ce qu’il y a ici de parfois nerveux et satirique. Ceci modèle de beau style : je me grâte [sic] la main. De plus, ton titre manque d’éclat et se confond avec les titres de l’affiche générale, or, il faut innover37 ».Roland-Manuel a semble-t-il eu le dernier mot, en conservant le titre d’Isabelle et Pantalon pour la création au Théâtre Lyrique.

Le premier projet avec Jane Bathori était sans doute d’une forme moins aboutie que la version donnée au Trianon-Lyrique, et la spontanéité favorisée dans le contexte d’émulation du Théâtre du Vieux-Colombier. On peut supposer qu’après l’achèvement de la partition de piano, Roland-Manuel s’est attelé à l’orchestration, supposition corroborée par le manuscrit de la partition de piano dont la Sinfonia était partiellement orchestrée, sans doute en vue de la donner en partie séparée.

En effet, certainement dans l’attente de pouvoir créer l’œuvre entière, la Barcarolle, la Sinfonia et l’Air d’Isabelle ont été donnés séparément, avec orchestre. Les dates de signature des manuscrits de ces extraits indiquent que l’orchestration n’était sans doute pas encore achevée au moment de l’édition de la partition de piano. Si Isabelle et Pantalon avait été donné au Vieux-Colombier, cela aurait peut-être été, pour des raisons financières, avec une instrumentation réduite. La première version de l’opéra était sans doute plus « spontanée » que celle créée ultérieurement au Trianon-Lyrique où l’orchestration définitive a sans doute bénéficié de l’orchestration des parties séparées données dans le cadre des concerts Colonne et Koussevitzky.

 

 

Extraits : Barcarolle, Sinfonia et Air d’Isabelle

 

Après l’achèvement du manuscrit de travail38 pour chant et piano, signé et daté « Paris, février 1919-26 décembre 1920 » à l’encre noire sur des papiers divers39, ont été données la Barcarolle qui ouvre l’acte II, et la Sinfonia d’ouverture (manuscrit daté du 18 août 1920). Deux présentations ont fait l’objet de deux comptes-rendus distincts d’André Cœuroy dans La Revue musicale de décembre (pour la Barcarolle40, aux Concerts Colonne) et de février 1922 (pour la Sinfonia, Concerts Koussevitszky41).

 

La Barcarolle

La Barcarolle est le premier fragment d’Isabelle et Pantalon donné en partie séparée, selon un compte-rendu d’André Coeuroy42: « Cette « Sinfonia » sert de prologue à l’opéra bouffe dont M. Roland Manuel a écrit la musique sur un livret de Max Jacob. Un fragment de l’œuvre (Barcarolle) avait été joué déjà avec un vif succès l’an dernier chez Colonne43. »Cette barcarolle (est-ce une allusion à la Barcarolle des Contes d’Hoffmann ?) qui ouvre l’acte 2 sert à introduire l’air d’Isabelle « Ah ! Que Venise est belle ».

André Cœuroy y souligne la cohésion entre texte et musique : « De même que le texte de M. Max Jacob ridiculise les grands élans du lyrisme romantique, de même la musique, avec une finesse extrême, se gausse des fadeurs sentimentales et des nuits vénitiennes, mais sans sécheresse aucune, et bien plutôt avec une indulgence un peu émue. Dès le début, une mélodie confiée aux cors rappelle malignement le Chant du gondolier de Mendelssohn et une des cavatines des Pêcheurs de perles. Des appels narquois de trompettes bouchées, des frissons de tambour de basque alternent avec de fugitifs soli de violoncelle et de premier violon, pendant que la mélodie vocale (très adroitement chantée par Mme Romanitza44) s’élance et monte vers des étoiles de papier doré. Les deux derniers accords, dans leur simplesse amusée de tierces, créent la béate atmosphère des Bords de la Riviera. Voilà de l’humour excellent, spirituel autant que sensible, qui nous met l’eau à la bouche pour la dégustation de l’œuvre entière45. »

 

La Sinfonia

Selon la tradition, le style « patchwork » de la sinfonia d’ouverture annonce celui de l’œuvre à venir. Brillante, dans la tonalité de majeur, affirmée par la présence constante d’une pédale, cette sinfonia est d’un plan tripartite traditionnel (vif-lent-vif : allegretto, molto moderato, lento et reprise de l’allegretto). Trois styles d’écriture distincts préparent l’auditeur à ce qui va suivre : un style contrapuntique-fugué fréquemment employé pour le Chœur des malades, récurrent à travers toute la partition (mes. 24-28 de la partition piano-chant), une écriture de type barcarolle dans la partie lente (mes. 53-57) symptomatique des parties d’Isabelle (cf. Air d’Isabelle du début de l’acte II). Et enfin, une écriture constituée de syncopes élégantes, presque « alla Poulenc » (Lento, mes. 61-73), instaurant un climat aérien, calme et paisible.

André Cœuroy est tout aussi élogieux sur la Sinfonia : « Monsieur Roland-Manuel a le sens du pittoresque, et il l’a de nature. Il a le sens orchestral et, par-dessus tout, ce sens aiguisé du ton qui sied le mieux à son vif penchant pour l’ironie. Il est ingénieux, il est charmant ; il possède la clarté et le piquant du discours ; et sa culture, qui est vraie, n’étouffe jamais sa musique qui est fine. Cette sinfonia en est le plus pertinent exemple, qui débute, allegretto, par un thème du plus pur dix-huitième aux violons46. »

Le manuscrit d’orchestre47 de cette sinfonia, signé du 18 août 1920, outre de nombreuses corrections, ratures et hachures, comporte de fréquents jeux dialogiques entre vents et cordes, de nombreuses indications de caractère et de tempi (« gracieux », « Pressez », « au mouvement ») et témoigne d’une grande finesse du travail d’orchestration (cf. mentions de modes de jeu : à la cadence « la moitié des violons », en pizz. Utilisation de baguettes d’éponge pour la cymbale, cordes arco ; au-dessus de la partie de tambours : « baguettes l’une sur l’autre »). On y retrouve l’usage du célesta. Le final de la Sinfonia requiert l’orchestre au grand complet.

 

Air d’Isabelle de l’acte I

L’Air d’Isabelle du premier acte (« Pauvre Isabelle »), écrit dans le style de la romance, est un andantino de forme ABA, avec cadence « alla Bellini » (mes. 52-60 de la partition chant-piano). Roland-Manuel projetait certainement de le donner également en morceau séparé, au regard du manuscrit de la partition d’orchestre conservé aux éditions Leduc48. Ce manuscrit, daté et signé du 28 août 1921, à Lyons-la-Forêt, témoigne d’une nouvelle étape intermédiaire avant la représentation au Trianon Lyrique. L’orchestration, qui est relativement analogue à celles de la Sinfonia et de la Barcarolle, prévoit 6 premiers violons, 6 seconds violons, 4 altos, 4 violoncelles, 4 contrebasses, flûtes, hautbois, clarinettes en la, bassons, cors en fa, trompettes, timbales et batterie (tambour de basque et triangle), célesta et harpe. L’Air de Pantalon en partie séparée (avec accompagnement de piano) est paru dans le supplément de La Revue musicale, le 1er avril 1921.

 

 

La création au Trianon-Lyrique

 

À la fin de l’année 1922, le projet est « sauvé » par le directeur du Théâtre du Trianon-Lyrique, Louis Masson49, et enfin donné en intégralité, avec Marcelle Evrard50 dans le rôle d’Isabelle. Roland-Manuel a sans doute rencontré Louis Masson par l’entremise de Ravel. Fils de Jean Ernest Masson (1894-1906), professeur de chant au Conservatoire de Paris, Louis Masson fait ses classes chez Gabriel Fauré, Paul Vidal, Albert Lavignac et André Gedalge. Depuis 1908, le Trianon-Lyrique, spécialisé dans l’opérette, est une succursale de l’Opéra-Comique51.

 

Proposition de décors

Une lettre de Max Jacob à Roland-Manuel de février 1922 (11 mois avant la création en décembre) indique que Roland-Manuel aurait proposé à Max Jacob de réaliser lui-même les décors : « Trouverais-tu excessif que je demandasse le quart des droits, en somme je suis un peu moins l’auteur du livret auquel tu as collaboré et insufflé ta gaieté. J’exagère, extravague, outrepasse mes droits ? Dis-le moi sans crainte de m’offenser. Toi, tu as tant travaillé et moi, je n’ai fait que des plaisanteries. Pour les décors, c’est impossible ! Je ne peux pas concurrencer Picasso et Derain, on se foutrait trop de moi, on le fait déjà assez ! […] J’aimais monsieur Masson, maintenant je l’adore, je ferai en novembre une gouache de Trianon que je lui offrirai ou à Madame Louis Masson52. »

Le décor sera finalement confié à Maxime Dethomas53, connu pour ses fusains rehaussés représentant des vues de Paris et d’Italie, au goût des maîtres vénitiens du XVIIIe siècle. Ayant illustré les Esquisses vénitiennes de Henri de Régnier après plusieurs séjours à Venise en 1906, il fut sans doute désigné en raison de sa fascination pour un sujet proche du thème de l’opéra. Avec Maxime Dethomas, le choix se porte sur un peintre décorateur figuratif passionné par l’expression des physionomies. Une photographie de la représentation de 1922 au Trianon-Lyrique montre un décor traditionnel avec arrière-plan rocheux découpé, au devant duquel figurent Isabelle, Zerbinette, Pierrot, Pantalon et Arlequin en rôle muet. Cette photographie pourrait avoir été prise lors du Quatuor final « Voici la police ! » et Entrée d’Arlequin (acte 2, avant le grand final avec chœur)54. Quatre planches de costumes de Maxime Dethomas pour Isabelle et Pantalon, imprimées par Heugel et rehaussées au pochoir, montrent des costumes traditionnels, notamment un Pantalon vêtu de rouge, affublé d’une grande cape noire et de lunettes contemporaines.

 

Répétitions et interprètes

Une lettre de Max Jacob à André Salmon de novembre 1922 évoque les répétitions difficiles et la couverture de presse : « Je suis à Paris, assez malade de l’estomac et du ventre. J’habite chez un petit peintre amical et dévoué, 10 rue Berthollet, M. Dubuffet. Je fais répéter une petite opérette à Trianon qui passe le 4 décembre. Je doute qu’il y ait un service de Presse… tout de même on verra… Mes journées se passent à gueuler sur la scène, mes matinées et mes soirées trop souvent à gueuler sur un canapé ou un lit. On paie les excès de santé de la jeunesse55.» Dans ces conditions difficiles mentionnées par Max Jacob, il n’est pas impossible que la date de création ait dû être repoussée du 4 au 11 décembre. Une lettre de Louis Masson au chef d’orchestre André Caplet56 du 25 décembre 1922 évoque le paiement (« un petit chèque ») et une éventuelle représentation ultérieure le 3 janvier 1923.

La partition chant-piano mentionne une distribution pour cinq solistes : Isabelle, femme de Pierrot (soprano, Marcelle Evrard), Zerbinette, suivante d’Isabelle (mezzo-soprano, Andrée Moreau), le Docteur Pantalon (basse bouffe, M. Marrio), Arlequin (baryton Martin, Alex Jouvin) et Pierrot (ténor, De Trévi). Alex Jouvin, créateur du rôle d’Arlequin, appartient au Trianon-Lyrique depuis 1907. En 1922, il était notamment en charge des représentations des « samedis du Trianon-Lyrique »57.

Maurice Bex salue cette distribution: « Mlle Marcelle Evrard est une Isabelle douée d’une voix jeune et délicieusement frêle qui fait avec la voix tonitruante de M. Marrio le contraste même que M. Max Jacob a voulu créer entre la tendre Isabelle et le vieux docteur Pantalon. Melle Andrée Moreau, MM. Alex Jouvin et de Trévi ont joué et chanté leur rôle avec talent et bonne humeur. L’orchestre, sous la direction de M. André Caplet, a paru mettre en valeur les moindres intentions du compositeur58. » À cette distribution de solistes s’ajoute le rôle déterminant du chœur, tant pour sa fonction structurante que son rôle comique.

 

Le rôle du chœur

Le chœur dans l’œuvre poétique de Max Jacob

Le chœur joue un rôle déterminant dans le quotidien de Max Jacob et dans son œuvre poétique. Le 24 juin 1917, Max Jacob participe au chœur des Mamelles de Tirésias59 de Guillaume Apollinaire, au Théâtre Renée-Maubel, rue de l’Armée-d’Orient. Dans le Dos d’Arlequin60, achevé d’être imprimé le 30 avril 1921, le chœur occupe une fonction structurante dans L’Auteur au Théâtre où il intervient à trois reprises. Comme dans Isabelle et Pantalon, les paroles burlesques, en rimes croisées, confiées au chœur des choristes ou au chœur des travailleurs, ridiculisent leur fonction. Ces similitudes entre le Dos d’Arlequin et Isabelle et Pantalon montrent les influences réciproques entre les écrits du poète et ceux du librettiste. La comédie lyrique permet à Max Jacob de développer son propre lyrisme.

 

Rôle du chœur dans Isabelle et Pantalon

Le rideau se lève sur l’Introduction et Chœur des malades à l’écriture homorythmique qui facilite la compréhension du texte burlesque. Le style du grand et du petit chœur évoque les tragédies lyriques de Lully. Ainsi, le petit chœur « Ne tombez pas sous la coupe / de Pantalon le docteur / On y mange de la soupe / Faite d’eau et de couleur61 ». Ce petit chœur sera répété textuellement, accentuant l’effet comique, entre l’air de Pantalon et l’air d’Isabelle. Le style homophone (ainsi que les rimes croisées) est conservé dans le petit chœur qui précède le final de l’acte 1. Dans la Scène et Chœur de malades : « Je réclame du chocolat62 » (Pantalon, les malades), l’effet comique provient du contraste entre la rigueur d’une écriture fuguée et le burlesque des paroles. Étonnamment, le chœur est beaucoup moins présent dans l’acte 2.

 

Un style mélangé

Dans un autre article, Georges Auric mentionne l’usage de nombreuses citations utilisées par Roland-Manuel : « Au devant d’une pièce où l’esprit de Labiche, l’attendrissement des romances de Meilhac et Halévy, la forte saveur des farces que nous allons voir à Médrano, ressuscitent, s’incorporent et se poétisent avec une fraîcheur miraculeuse, trop de personnes, parmi les mieux intentionnées, furent déçues pour s’être à l’avance embarrassées d’idées et de jugements tous faits63. »

Une parodie d’« Adieu, notre petite table » de Manon de Massenet est identifiable dans la Romance de Pierrot où Max Jacob lui fait dire : « Il y a notre petite table, elle n’a jamais qu’un couvert, Venise à deux, c’était supportable, malgré les puces et le chemin d’fer, â64 » sur le motif musical de Massenet (mes. 25 à 32).

Entre autres « clichés » de l’opéra-comique, Roland-Manuel confie à Arlequin une sérénade hispanisante (Sérénade d’Arlequin65, acte II) avec mélismes hispaniques sur « Manola », « sonnez, bassons et castagnettes »et effets comiques sur « Nouga, Nouba : distributions de chocolats après l’entracte ». Selon Georges Auric, « dans Isabelle et Pantalon, il y a, par exemple, un peu trop pour notre gré de frôlements de percussions appuyant systématiquement certains rythmes. C’est pourquoi quelquefois l’essence même de tel morceau nous échappe à demi : ainsi pour la Sérénade d’Arlequin au IIe acte, où il nous a paru que nous retrouvions un peu de l’attirail sonore de L’Heure espagnole66. »

Les paroles de l’Ariette de Zerbinette « avoir l’amour de son patron »67 noté « Alla Chabrier» semblent empruntées au théâtre de boulevard. Roland-Manuel use fréquemment de passages dissonants comme pour évoquer la vie moderne et les références textuelles de Max Jacob mêlant rimes croisées classiques au langage familier moderne. Les paroles de l’air évoquent le modernisme de Ne coupez pas, Mademoiselle ou Les erreurs des PTT68, donné à la Galerie Simon, à Paris, en 1921.

 

 

Reprise à l’Opéra-Comique en mai 1959

 

La reprise d’Isabelle et Pantalon le 22 mai 1959, à l’Opéra-Comique, sera couplée à La Voix humaine de Poulenc avec Denise Duval et La Véridique Histoire du docteur de Maurice Thiriet. Selon le critique Jean-Louis Causson, la direction de Georges Prêtre manquait de répétitions : « J’ai dit plusieurs fois l’estime en laquelle je tiens Georges Prêtre. C’est un excellent chef d’orchestre et un homme consciencieux. J’aime la manière dont il met au point les ouvrages qu’il dirige. Mais c’est précisément la mise au point qui m’a déçu cette fois. L’orchestre était lourd, les tempi paresseux. Manque de répétitions suffisantes, voilà, me semble-t-il, l’explication. La liberté ne s’improvise pas69. »

 

Décors et costumes

Le décor70 ocre-orangé, confié à Jean-Pierre Ponnelle, représente un palais vénitien sur la droite avec fenêtres ogivales de style hispano-arabe, filigrané de blanc. Sur le côté est installée une haute tour vénitienne avec une cloche, sur laquelle est inscrit avec humour « douche ». L’arrière-plan montre Venise et la lagune. « La médecine » et « hyppocrate » sont inscrits sur deux socles. Des statues d’une femme et d’un homme nus, bras coupés, tous deux coiffés d’un chapeau de commedia dell’arte voisinent avec des poubelles d’hôpitaux blanches à croix rouge. Les costumes dessinés par Suzanne Roland-Manuel (13 planches de costumes71) sont dans le style de la commedia dell’arte.

 

Une chorégraphie qui double les acteurs

Au-delà du rideau de scène reproduisant les personnages, un jeu de scène était prévu devant le rideau et le critique Jean-Louis Causson rend compte d’une doublure chorégraphique des acteurs72 imaginée par le metteur en scène P. E. Deiber, ayant fait appel au chorégraphe Jacques Chazot : « les trois personnages chanteurs seront doublé par les trois « mêmes » personnages danseurs. Les uns se substituent aux autres – dans des scènes de comédie, mais surtout pas durant les passages chantés – ; seules Liliane Berton et Nadine Renaux danseront elles-mêmes. Nous assisterons donc à une mise en scène entre le théâtre et la danse73. » 

 

 

Dans un article du 3 janvier 1923, Boris de Schloezer évoque une « résurrection de l’opéra bouffe » : « Allons-nous assister à la renaissance de l’opéra bouffe ? Je suis tenté de croire à la possibilité de la résurrection depuis que j’ai entendue au Trianon-Lyrique l’Isabelle et Pantalon de M. Roland-Manuel. […] La musique de M. Roland-Manuel possède une qualité extrêmement rare : elle est gaie, spirituelle, gracieuse. C’est vraiment de la musique « légère », au sens exact de ce mot, que l’on a détourné de sa véritable signification. J’ai entendu reprocher à Isabelle de n’être pas suffisamment « drôle », de ne pas provoquer le rire. Mais il me semble que le compositeur et le poète, Max Jacob, n’ont nullement prétendu nous faire rire et écrire des drôleries : la gaieté, la bonne humeur, la grâce souriante peuvent être évoquées sans faire jaillir le rire ». Si le rire est au cœur du livret de Max Jacob, la musique de Roland-Manuel conserve une extraordinaire maîtrise des styles.

Isabelle et Pantalon rejoint une série d’œuvres liées au renouveau de la commedia dell’arte, dont Salade74 de Milhaud, contrepoint chorégraphique créé le 17 mai 1924 lors des Soirées de Paris du comte de Beaumont au théâtre de La Cigale, qui met en scène Isabelle, pupille du Docteur, destinée à Tartaglia alors qu’elle est amoureuse de Cinzio.

Mais on peut s’étonner du peu d’influence de la technique de la commedia dell’arte – retournements toujours possibles, surprises, résurgences les plus inattendues – sur la musique d’Isabelle et Pantalon. Dans son compte-rendu pour Nord-Sud des Mamelles de Tirésias, Max Jacob conclut : « Le burlesque doit être lyrique pour être de l’art, et le lyrisme peut être burlesque puisque le rire est le lyrisme du pauvre75. » Avec Isabelle et Pantalon, l’esprit Cornet à dés conquiert la scène et le music-hall. Car le théâtre de Max Jacob n’a guère été joué. Parallèlement à Isabelle et Pantalon, Poulenc mettra en musique Quatre poèmes de Max Jacob76 composés en août-septembre 1921, d’une tout autre veine.

Roland-Manuel poursuivra l’aventure de l’opérette avec Le Diable amoureux, œuvre lyrique d’après Cazotte.

Rendant compte du Roi Pausole d’Honegger, Roland-Manuel relate des propos d’Honegger qu’il pourrait presque faire siens concernant Isabelle et Pantalon : « j’ai cherché, au contraire, à écrire un opérette de caractère uniquement musical en m’inspirant de Mozart, de Chabrier, de Messager – de réaliser, en un mot, une musique qui ne fut pas esclave des préoccupations du moment77. » Sans doute l’intention primaire de Roland-Manuel et de Max Jacob était-elle surtout de créer une œuvre « savoureuse », au-delà de toutes conventions.

 

 

 

Chronologie du projet

 

novembre 1918

Lettre de Max Jacob à André Salmon dans lequel il évoque qu’il termine un opéra-comique avec Roland-Manuel.

18 décembre 1918

Répétition avec Max Jacob, Jane Bathori, et Roland-Manuel mentionnant des « coupures, ajoutures », etc.

février 1919-26 décembre 1920

Dates consignées à la fin du manuscrit chant-piano à l’encre noire sur des papiers divers : la Sinfonia sur un grand papier à 20 lignes, le reste sur des papiers oblongs, principalement à 16 lignes. Il a servi pour la gravure de la partition chez Heugel en 1922.

18 août 1920

 

Signature du manuscrit de la Sinfonia donnée en parties séparées aux Concerts Colonne

1er avril 1921

Édition d’un supplément à La Revue musicale avec l’Air de Pantalon, version chant-piano

28 août 1921

Signature du manuscrit pour orchestre de l’Air d’Isabelle donné en parties séparées

novembre 1922

Répétitions d’Isabelle et Pantalon au Trianon-Lyrique

4-11 décembre 1922

 

Représentations d’Isabelle et Pantalon au Trianon-Lyrique

décembre 1922

Compte-rendu de la Sinfonia jouée aux Concerts Colonne

3 janvier 1922

Lettre d’André Masson à André Caplet dans laquelle il lui propose une représentation supplémentaire le 3 janvier 1923.

février 1922

Compte-rendu de la Barcarolle jouée au Concerts Koussevitzky

27 février 1922

Lettre de Max Jacob qui réclame ses droits à Roland-Manuel.

janvier 1923

Article de Maurice Bex sur le compte-rendu de la création intégrale en décembre 1922.

mai 1959

Reprise à l’Opéra-Comique sous la direction de Georges Prêtre, mise en scène de Paul-Émile Deiber, décors de Jean-Pierre Ponnelle, chorégraphie de Jacques Chazot et costumes de Suzanne Roland-Manuel.

Notes

1 Dans une lettre à André Salmon du 18 août 1921, Max Jacob mentionne « une petite opérette » puis, en novembre 1918, dans une autre lettre à André Salmon, un « opéra-comique ». La terminologie choisie pour l’édition de la partition de chant-piano sera « opéra bouffe ». N.B. : l’original de cette lettre est aujourd’hui introuvable. Une photocopie conservée par Pierre-Marcel Adéma a été reproduite dans : JACOB Max, SALMON André, Correspondances : 1905-1944, Paris, Gallimard, 2009, p. 99.

2 Cette date est celle qui figure sur une notice bibliographique rédigée par José Bruyr en 1930 (in : L’Écran des musiciens, préface d’André Cœuroy, Paris, Les Cahiers de France, 1930, p. 116). Sur la partition chant-piano est mentionné : « Représenté pour la première fois au Théâtre Trianon-Lyrique à Paris, en décembre 1922 », sans précision de jour.

3 Le Théâtre du Trianon-Lyrique, situé au 80 boulevard Rochechouart dans le 18e arrondissement de Paris, était depuis 1908 une succursale de l’Opéra-Comique spécialisée dans l’opérette. À l’époque d’Isabelle et Pantalon, Louis Masson en est le directeur.

4 Article de Maurice Bex dans Le Mois musical, Au Trianon-Lyrique, Isabelle et Pantalon, compte-rendu de la création le 11 décembre 1922. Le Théâtre et Comoedia illustré, 26e année, janvier 1923, no 13.

5 Article de Georges Auric, découpe de presse non référencée et non paginée, archives privées de Gilles Roland-Manuel.

6 Sous la direction d’André Caplet, décor de Maxime Dethomas, mise en scène de Léon Joubert.

7 Sous la direction de Georges Prêtre, décors de Jean-Pierre Ponnelle, mise en scène de Paul-Emile Deiber, costumes de Suzanne Roland-Manuel, chorégraphie de Jacques Chazot.

8 Le salon des Roland-Manuel, situé dans leur appartement du 42 rue de Bourgogne à Paris, est assidûment fréquenté le lundi par Maurice Ravel, Albert Roussel, Georges Auric, Arthur Honegger, Maurice Delage, Pierre Bertin, Jane Bathori, etc.

9 Pianiste et écrivain, Suzanne Roland-Manuel dessinera les costumes de la reprise d’Isabelle et Pantalon en 1959. Présente aux répétitions, elle y a peut-être assuré une partie de l’accompagnement au piano.

10 JACOB Max, Le Laboratoire central, 1921, long poème en vers achevé à Saint-Benoît-sur-Loire.

11 La Mort de sainte Alméenne, mystère en deux tableaux, texte de Max Jacob, musique d’Arthur Honegger, au programme du Vieux-Colombier.

12 Lettre de Max Jacob à André Salmon, novembre 1918.

13 JACOB Max, Lettres à René Rimbert, notes de Christine Andreucci et Maria Green, Mortemart, Rougerie, 1983, p. 30.

14 Max Jacob composera d’autres textes d’opérettes, notamment Un amour du Titien avec Henri Sauguet ou Les Impôts avec Cliquet-Pleyel.

15 GUIETTE Robert, La Vie de Max Jacob, Paris, A.G. Nizet, 1976, p. 65. Ces croquis serviront de base aux illustrations du Dos d’Arlequin.

16 Six ans après la création d’Isabelle et Pantalon, Roland-Manuel fera paraître Maurice Ravel et son œuvre dramatique, dans lequel il analyse L’Heure espagnole.

17 Le Cornet à dés paraît sur souscription et à compte d’auteur en novembre 1917. Le volume réalisé chez l’imprimeur Levé compte quarante exemplaires de luxe, avec un Arlequin gravé par Picasso pour les exemplaires Japon.

18 Phanérogame, « roman humoristique et philosophique » paru mi-décembre 1918, s’offre comme un vaste dialogue qui sort des presses Levé. Après l’Arlequin, c’est un Pierrot gravé de Picasso qui illustre les tirages de luxe.

19 Lettre manuscrite, archives Gilles Roland-Manuel.

20 Le nom d’Angèle Bathori est peut-être un clin d’œil à Angèle Duglet, nièce de Gounod, qui tenait salon boulevard Malesherbes.

21 À la demande de Jacques Copeau alors à New York, saisons 1917-1918 et 1918-1919.

22 ROLAND-MANUEL, Hommage funèbre, 1914.

23 Donné le 24 décembre 1917 avec Poètes morts à la guerre, une conférence de Fernand Divoire, avec des poèmes de Charles Péguy (entre autres).

24 Partition piano et chant, Acte I, Scène et Chœur des malades, Paris, Heugel, 1922, p. 1.

25 Ibid., p. 12.

26 En pharmacie, préparation liquide, sucrée et aromatisée, servant de base aux potions (julep simple et julep gommeux). Le Mint Juleps est un cocktail alcoolisé.

27 Partition piano et chant, op. cit., p. 13.

28 Article de Maurice Bex dans Le Mois musical, art. cit.

29 Lettre du 18 décembre 1918 de Max Jacob à André Salmon. N.B. : l’original de cette lettre est aujourd’hui introuvable. Une photocopie conservée par Pierre-Marcel Adéma a été reproduite dans : JACOB Max, SALMON André, Correspondances : 1905-1944, op. cit., p. 51.

30 Partition piano et chant, op. cit., Acte I, Danse d’Arlequin, p. 28-29.

31 Partition piano et chant, op. cit., Acte II, Entrée d’Arlequin, p. 78.

32 Lettre à Roland-Manuel du 27 juin 1920 : « j’ai trouvé votre article sur Pulcinella qui m’a beaucoup touché ». Cité dans STRAVINSKY Igor, Poétique musicale, Paris, Flammarion, Harmoniques, édition établie, présentée et annotée par Myriam Soumagnac, 2000, p. 29.

33 Notamment aux étudiants de Jacques Copeau.

34 Ensemble des traitements mettant à profit les propriétés de l’eau, notamment au cours de la kinésithérapie, de la thalassothérapie (bains, douches, etc.).

35 Partition piano et chant, op. cit., page de couverture.

36 Georges Berr (1867-1942) était un acteur membre et sociétaire de la Comédie-Française de 1886 à 1923 qui mit notamment en scène L’Amour médecin de Molière en 1920 à la Comédie-Française.

37 Lettre de Max Jacob à Roland-Manuel, propriété de Gilles Roland-Manuel.

38 Ce manuscrit, qui présente de nombreuses ratures et corrections, a servi pour la gravure de la partition chez Heugel en 1922.

39 La Sinfonia sur grand papier à 20 portées, le reste sur des papiers oblongs, principalement à 16 portées.

40 La Revue Musicale, février 1922, 3e année, no 4.

41 En 1921, Koussevitzky, qui avait créé son propre orchestre qu’il dirigeait, donna une série de concerts intitulée « Grands Concerts Symphoniques Koussevitzky ».Après le 20 avril 1922, ces concerts furent donnés bisannuellement, une série au printemps et une série à l’automne. Koussevitzky y dirige fréquemment la musique de Ravel.

42 CŒUROY André, La Revue musicale, décembre 1922 (4e année, no 2, décembre 1922, p. 166). Dans les « Chroniques et notes, la musique en France et à l’étranger », « Ouverture d’Isabelle et Pantalon (concerts Koussevitzky) de Roland-Manuel » par André Cœuroy.

43 CŒUROYAndré, Les Concerts, “Barcarolle” par Roland Manuel, La Revue musicale, 1er février 1922, p. 160.

44 Madame Romanitza (1888-1944) est une artiste lyrique roumaine qui chanta notamment dans Le astuzie femminili, commedia per musica en 2 actes sur un livret de Giuseppe Palomba d’après l’Amor rende sagace de Bertati représenté à l’Opéra de Paris le 27 mai 1920 dans une version opéra-ballet avec une orchestration revue par Ottorino Respighi. Elle interpréta également la partie de chant des Biches, ballet en un acte avec chant de Francis Poulenc, commande de Serge Diaghilev pour les Ballets russes en 1921, composé en 1923.

45 CŒUROY André, Les Concerts, “Barcarolle” par Roland Manuel, art. cit., p. 160.

46 CŒUROY André, « Ouverture d’Isabelle et Pantalon (concerts Koussevitzky) de Roland-Manuel »,

La Revue musicale, in : « Chroniques et notes, la musique en France et à l’étranger », décembre 1922, 4e année, no 2, p. 166.

47Manuscrit consulté chez Gilles Roland-Manuel.

48 L’écriture du conducteur est de la main de Roland-Manuel mais non celle des parties séparées.

49 Louis Masson, directeur de la musique au Casino de Deauville et chef d’orchestre à la Gaîté-Lyrique, devient directeur du Trianon-Lyrique à partir de 1916.

50 Marcelle Evrard est une chanteuse de la troupe de l’Opéra-Comique.

51 Rappelons pour mémoire que l’Opéra-Comique est placé, depuis 1918 et jusque 1924, sous la direction d’Albert Carré. Son mandat expiré, il en conservera le poste de directeur honoraire aux côtés de Louis Masson et de Georges Ricou, désignés en septembre 1924.

52 Lettre de Max Jacob à Roland-Manuel, 27 février 1922, N° 22 de l’épistolaire publié dans les Cahiers Max Jacob

53 Maxime Pierre Jules, dit Maxime Dethomas, est un ami de Toulouse-Lautrec, et un proche de Vuillard et Bonnard. Jacques Rouché lui confia de nombreuses commandes de décors et costumes au Théâtre des Arts, puis à l’Opéra, à la Comédie-Française, à l’Opéra-Comique, au Trianon-Lyrique (La Belle de Haguenau, 1924) et au Châtelet. En 1915, il avait réalisé avec succès le décor pour l’acte III des Goyescas de Granados à l’Opéra de Paris. Le fonds Dethomas[53] (Répertoire Arts et spectacles, BNF, site Richelieu) réunit plus de 30 maquettes et dessins mais aucun d’Isabelle et Pantalon.

54 Partition chant et piano, op. cit., p. 73-78.

55 Lettre de Max Jacob à André Salmon, novembre 1922 N.B. : l’original de cette lettre est aujourd’hui introuvable. Une photocopie conservée par Pierre-Marcel Adéma a été reproduite dans : JACOB Max, SALMON André, Correspondances : 1905-1944, op. cit., p. 130.

56 Lettre autographe de Louis Masson à André Caplet, Paris, 25 décembre 1922. Bibliothèque nationale de France, Gallica.

57 Présentation dans un programme de 1922, Temple de l’amour à Versailles.

58 Maurice Bex, « Au Trianon-Lyrique, Isabelle et Pantalon », compte-rendu de la création le 11 décembre 1922, Le Mois musical, art. cit.

59 « Drame sur-réaliste en deux actes et un prologue de chœurs, musique et costumes selon l’esprit nouveau ».

60 Sous-titré « Petit drame portatif ». Tirage de ce volume limité. Achevé d’imprimer le 30 avril 1921 par Ducros, Lefèvre et Colas, 7 rue Croulebarbe, Paris.

61 Partition chant et piano, op. cit., p. 17.

62 Ibid., p. 6.

63 AURIC Georges, Isabelle et Pantalon, Trianon-Lyrique, article dont la source n’est pas mentionnée, propriété de Gilles Roland-Manuel.

64 Partition chant et piano, ibid., p. 51.

65 Partition chant et piano, ibid., p. 60.

66 AURIC Georges, Isabelle et Pantalon, Trianon-Lyrique, art. cit. L’Heure espagnole de Ravel date de 1907 et fut créée en 1911.

67 Partition chant et piano, ibid., p. 24

68 Ne coupez pas, Mademoiselle ou Les erreurs des PTT, conte philosophique de Max Jacob illustré par Juan Gris, 1921.

69 CAUSSON Jean-Louis, « Création à l’Opéra-Comique de Isabelle et Pantalon, opéra-bouffe de Max Jacob et Roland Manuel ». Article de presse du 22 mai 1959, dossier d’œuvre, BNF, site Opéra.

70 Décor de J. P. Ponnelle, BNF, site Opéra.

71 Planches de costume de Suzanne Roland-Manuel, BNF, site Opéra.

72 La distribution est complétée par Pierre Germain, Charles Clevensy et Raymond Amade.

73 CAUSSON Jean-Louis, « Création à l’Opéra-Comique de Isabelle et Pantalon, opéra-bouffe de Max Jacob et Roland Manuel », art. cit.

74 Livret d’Albert Flamand, musique de Darius Milhaud, chorégraphie de Massine, décors et costumes de Georges Braque.

75 Cité dans : JACOB Max, Œuvres, Quarto-Gallimard, p. 62.

76 Les Quatre poèmes de Max Jacob, avec accompagnement de flûte, clarinette, basson, hautbois et trompette, dédiés à Milhaud sont donnés en première audition le 7 janvier 1922. Édition en 1993 chez Salabert à partir de la copie conservée par Darius Milhaud.

77 ROLAND-MANUEL, « L’œuvre lyrique d’Arthur Honegger et de Darius Milhaud », dans :Le Théâtre lyrique en France depuis les origines jusqu’à nos jours, Troisième partie, de l’année 1900 à nos jours. Tome 3, Ministère des P. T. T, Direction de la radiodiffusion, Poste national Radio-Paris, Conférences sur la musique, Paris, 1938, p. 257-265.

Pour citer ce document

Dominique Escande, «Colloque Roland-Manuel (novembre 2016) | De l’Institut hydrothérapique à Isabelle et Pantalon», La Revue du Conservatoire [En ligne], Actualité de la recherche au Conservatoire, Le septième numéro, La revue du Conservatoire, mis à jour le : 24/05/2019, URL : http://larevue.conservatoiredeparis.fr/index.php?id=2111.

Quelques mots à propos de :  Dominique Escande

Dominique Escande a soutenu sa thèse de doctorat sur les « Convergences et divergences de la musique et des beaux-arts autour de l’idéal classique en France : 1909-1937 » à l’Université de Paris-Sorbonne. Elle suit un double parcours dans l’enseignement (agrégation, universités) et dans la culture (Cité de la musique, Philharmonie Luxembourg), et enseigne depuis septembre 2018 la poétique comparée (esthétique), l’histoire de la musique et l’histoire des arts et civilisations aux départements Musicologie et Arts du spectacle de l’Université de Paris-Saclay (Évry). En 2012, elle a présenté une communication sur le ballet Le Tournoi singulier de Roland-Manuel et Foujita à la Maison de la Recherche. Son dernier article publié porte sur « La création de L’Enfant et les sortilèges de Maurice Ravel à Monte-Carlo » (Avant-Scène Opéra). Elle a présenté en septembre 2018 une communication sur Pelléas et Mélisande de Claude Debussy (production de Cocteau, 1962) et présentera prochainement une communication sur le ballet La Nuit transfigurée (1923) orchestré par Louis Aubert.