Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris
n°7
Caroline Delume

Questions instrumentales dans la création pour théorbe

Article
  • Résumé
  • Abstract

Le théorbe a principalement été joué au XVIIe siècle, en solo et en basse continue. Jouer d’un instrument qui a disparu pendant plus de deux cents ans pose des questions concernant son répertoire originel. Créer sur le théorbe de nouvelles pièces composées aux XXe et XXIe siècles interroge de multiples façons les possibilités de l’instrument, qui s’articulent alors entre des usages anciens et des modes de jeu contemporains. Dans un premier temps, l’originalité de cette articulation est analysée par quelques exemples rencontrés dans des œuvres que j’ai créées depuis 1995, ce qui permettra dans un deuxième temps d’aborder la spécificité de la place de l’interprète entre l’écriture des compositeurs contemporains et les particularités d’un instrument ancien.

Texte intégral

Le théorbe a principalement été joué au XVIIe siècle, en solo et en basse continue. Jouer d’un instrument qui a disparu pendant plus de deux cents ans pose des questions concernant son répertoire originel. Créer sur le théorbe de nouvelles pièces composées aux XXe et XXIe siècles interroge de multiples façons les possibilités de l’instrument, qui s’articulent alors entre des usages anciens et des modes de jeu contemporains.

Dans un premier temps, l’originalité de cette articulation est analysée par quelques exemples rencontrés dans des œuvres que j’ai créées depuis 1995, ce qui permettra dans un deuxième temps d’aborder la spécificité de la place de l’interprète entre l’écriture des compositeurs contemporains et les particularités d’un instrument ancien.

 

 

Le théorbe : un instrument moderne

 

Le théorbe est un luth tardif dont le registre est élargi vers le grave grâce à l’ajout de cordes longues attachées à un deuxième chevillier situé à l’extrémité du prolongement du manche. Loin d’être fixé dans ses dimensions, le théorbe est un instrument qui peut atteindre une grande longueur de cordes vibrantes au début du XVIIesiècle, aussi bien sur le petit jeu que sur le grand (on entend par petit jeu les cordes placées sur une touche, sur laquelle les doigts de la main gauche s’appuient près des frettes qui divisent la corde en intervalles ; le grand jeu réunit les cordes longues jouées à vide comme la harpe).


	Bellerofonte Castaldi, autoportrait, Capricci a due stromenti cioe tiorba e tiorbino (1622), Biblioteca Forni, Modena.

Bellerofonte Castaldi, autoportrait, Capricci a due stromenti cioe tiorba e tiorbino (1622), Biblioteca Forni, Modena.

La plupart des théorbes actuels se différencient du luth par l’usage de cordes simples, l’augmentation du volume sonore, mais aussi par un accord à cordes « ravalées » : les deux premières cordes, situées à l’opposé des cordes graves, sont accordées une octave plus bas qu’elles le seraient sur un luth, de sorte que la corde la plus aiguë est la troisième. Un exemple de cet accord ordinaire du théorbe est donné dans le Tiento de Florentine Mulsant, où le geste final consiste à balayer d’un doigt toutes les cordes de la 1re à la 14e.


	Tiento pour théorbe de Florentine Mulsant (1994), dernière mesure. Tablature réalisée par Caroline Delume, Furore Edition.

Tiento pour théorbe de Florentine Mulsant (1994), dernière mesure. Tablature réalisée par Caroline Delume, Furore Edition.

Le théorbe est caractérisé par ses 14 cordes, ce qui est beaucoup pour un instrument à manche. Le grand jeu comprend aujourd’hui 6 cordes, parfois 7, dont la tension ne peut pas être modifiée pendant une pièce sans prendre un temps d’arrêt. Au XVIIe siècle le grand jeu comptait plutôt 8 cordes, mais les théorbistes jouent aujourd’hui le plus souvent avec 8 cordes sur le petit jeu pour répondre à la nécessité de jouer la basse continue dans beaucoup de tonalités dans les programmes de concerts actuels.

Les frettes qui divisent les cordes du petit jeu sont nouées. Elles sont au nombre de 7 à 9 autour du manche, et sont parfois complétées par des barrettes collées sur la table jusqu’à atteindre l’octave de la corde à vide sur les cordes aiguës.

Le placement des frettes peut faire l’objet d’un choix de tempérament ancien, pas aussi précis que sur les instruments à clavier ou la harpe, mais satisfaisant en mésotonique pour les tonalités principales.

La notation du répertoire originel du théorbe est une tablature (française ou italienne), c’est-à-dire une notation indiquant les gestes du jeu plutôt qu’un solfège précisant les notes qui doivent sonner. La tablature indique quelles cordes doivent être pincées et les endroits où poser les doigts. Les lignes indiquent les cordes, le plus souvent les six premières du petit jeu. Les lettres ou chiffres codifient les divisions de la corde. La deuxième notation de la musique ancienne pour théorbe est la basse continue, qui est commune aux autres instruments d’accompagnement harmonique, et qui se lit sur portée avec des accords chiffrés.


	Bellerofonte Castaldi, Arpeggíata a mío modo in Capricci a due stromenti cioe tiorba e tiorbino (1622), Biblioteca Forni, Modena.

Bellerofonte Castaldi, Arpeggíata a mío modo in Capricci a due stromenti cioe tiorba e tiorbino (1622), Biblioteca Forni, Modena.

Le travail de la résonance du son sur un instrument à cordes pincées sollicite une attention soutenue aux conditions de jeu : par exemple les qualités physiques des cordes utilisées, leur tension, et l’espace du concert.

Sur un instrument comme le théorbe, les choix de facture instrumentale, les longueurs vibrantes des cordes et le type de cordes utilisé (boyaux de mouton, de bœuf, ou bien matériaux synthétiques), leur tension, ainsi que la façon d’attaquer les cordes ou la longueur des ongles influencent considérablement le rapport entre l’énergie de l’attaque et la durée et la courbe dynamique de la vibration.

 

 

Nouvelle musique pour théorbe : exemples de gestes

 

Le théorbe offre un espace suffisamment ouvert pour être le lieu d’expérimentations gestuelles et instrumentales. L’attention peut se porter sur les résonances et par conséquent le rapport entre vibration de la corde et écoute, sur la relation entre l’accord de l’instrument et l’écriture harmonique, sur la plasticité des formes sonores fabriquées dans la continuité ou la discontinuité des gestes, sur la densité polyphonique et polytimbrique dans les modes de jeux.

Dès l’origine, la musique pour théorbe (aussi nommé chitarrone en Italie) a donné lieu à des inventions gestuelles et expressives, comme en témoignent les pièces très expérimentales de Giovanni Girolamo Kapsberger ou Bellerofonte Castaldi dans le premier quart du XVIIe siècle.

Lorsque l’expression musicale implique une imbrication des gestes instrumentaux et du son, le travail de l’instrumentiste face à l’écriture du compositeur s’articule de plusieurs façons. Il consiste à résoudre les questions de notation, modification du rapport entre gestes et sons par les différents accords de l’instrument, utilisation des mains dans l’espace topographique de l’instrument, rythme et vitesse de déplacements, développement de modes de jeu et invention de techniques nouvelles.

Le théorbiste jouant le répertoire d’origine ou la basse continue fabrique le rapport entre les gestes ordinaires et l’écoute sur les intervalles. Le jeu du pouce fonde la pensée harmonique. Le bras droit est l’axe d’une balance entre pouce et petit doigt. Les basses sont exclusivement jouées par le pouce, et le grand jeu n’est utilisé qu’en cordes à vide, sollicitant une ouverture parfois importante du compas entre pouce et index, c’est à dire entre la basse et la première note ajoutée dans l’harmonie.
Loin de cet usage originel, la nouvelle musique pour théorbe n’exclut pas la possibilité de jouer ensembles plusieurs cordes du grand jeu, ou bien de faire sonner les sons harmoniques sur les longues cordes. Ces nouvelles techniques empruntent aux harpistes les notions d’empreinte et de préparation. Le théorbiste, qui doit constamment anticiper le placement et déplacement du pouce dans le jeu ordinaire, doit aujourd’hui parfois préétablir des schémas de déplacements de positions de jeu de toute la main ou du bras droits, simultanément aux contraintes de vitesse dues à l’organisation rythmique. La complexité des déplacements peut imposer une longue assimilation de type chorégraphique du jeu des bras, mains, doigts.

L’espace investi est large. Certains gestes, notamment de continuité, ne sont réalisables qu’en sollicitant le corps différemment, comme la surface des mains plus ou moins largement en contact avec les cordes, des dispositions et écartements des doigts inusités auparavant, des modes de jeu issus de la technique moderne de la guitare.

La création de nouvelle musique nécessite parfois une notation différente, ou bien une réécriture de procédures et de doigtés par l’instrumentiste, soit sous forme d’annotations sur la partition, soit sous forme d’esquisses préparatoires utilisées en plus de la partition.

Quelques exemples montreront ci-dessous certains aspects de ce travail de recherche de l’interprète dans la création de musique pour théorbe.

Le choix de laisser vibrer, spécifiquement dans les pièces lentes, est une utilisation appropriée de la qualité des longues résonances et des accords arpégés du théorbe.

L’instrumentiste doit rechercher les doigtés permettant au maximum de laisser sonner les notes.


	Purple Cloud on the Edge of the Invisible Seade Karim Haddad (2008).

Purple Cloud on the Edge of the Invisible Seade Karim Haddad (2008).

L’importance donnée aux résonances est souvent liée à une souplesse de l’écriture rythmique comme c’était le cas dans les préludes de Robert de Visée. Certaines pièces nouvelles pour théorbe s’inscrivent ainsi dans la continuité des pièces anciennes, dans le sens où le phrasé et la répartition des doigtés utilisent le jeu en accords brisés et les liaisons de main gauche (coulés). Le Prélude et le Lamento pour théorbe de Philippe Fénelon sont les deux pièces pour théorbe seul des 18 Madrigaux. La façon de jouer est proche de la répartition des actions des mains dans la musique française de la fin du XVIIe siècle, avec un phrasé et une expressivité dynamique notés avec précision à jouer dans le style non mesuré.


	Lamento pour théorbe de Philippe Fénelon, extrait des 18 Madrigaux (1996).

Lamento pour théorbe de Philippe Fénelon, extrait des 18 Madrigaux (1996).

Dans son opéra Caravaggio, Suzanne Giraud inclut dans l’orchestre un groupe d’instruments anciens, parmi lesquels deux théorbes. L’écriture de ces parties est en grande partie fondée sur une réalisation d’harmonies notées de façon à ce que les théorbistes choisissent eux-même les façons d’arpéger, comme ils le feraient dans une basse continue.


	Caravaggio de Suzanne Giraud (2012), partie de théorbe, début de la scène 3 de l’acte 1.

Caravaggio de Suzanne Giraud (2012), partie de théorbe, début de la scène 3 de l’acte 1.

Cette notation très idiomatique pour le théorbe a été utilisée dans d’autres pièces récentes, comme dans die fette Seele pour ensemble vocal et instrumental de Klaus Lang (2013), qui inclut par ailleurs des citations de musique ancienne en basse chiffrée. Karim Haddad introduit aussi de petites incrustations de basse continue optionnelle dans Purple Cloud on the Edge of the Invisible Sea (Haddad, 2008)1.

Le théorbe est ainsi parfois réutilisé dans la musique contemporaine pour y jouer exactement ce rôle d’instrument adapté à l’accompagnement des voix qui a été à l’origine de son invention. L’accompagnement au luth a d’abord consisté à suivre les voix colla parte. C’est le choix qu’a fait Klaus Huber pour certaines des parties instrumentales des Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdi, qui était en 1996 sa première œuvre composée avec une partie de théorbe2. L’instrument est accordé en mésotonique, avec la quatrième frette doublée, de façon à avoir une tierce pure par rapport aux cordes à vide : dodièse, sol dièse, dièse, si, fa dièse et do dièse (en partant de la première corde), et à avoir aussi bémol, la bémol, mi bémol, do bémol, sol bémol et bémol à une petite distance de la frette précédente. Le début de la partie de théorbe de la première pièce Exaudi vocem meam précise l’accord du grand jeu pour l’ensemble des Lamentationes. Les quatre parties vocales sont écrites sur deux portées. Il est impossible de tout jouer, mais le théorbiste peut organiser son propre parcours, en favorisant les basses, et la qualité des résonances. La partie de théorbe est laissée ainsi ouverte à d’autres choix d’interprétation. Il est indéniable que les possibilités de réaliser certaines positions ou enchaînements dépendent à la fois de la technique de jeu et de la dimension de l’instrument joué, qui peut être très variable pour un théorbe. Sur ce début de l’œuvre, mes annotations au crayon précisent certaines suppressions de notes, faites dès le départ en concertation avec Klaus Huber, et indiquent certaines syllabes prononcées par les chanteurs pour mieux réaliser le colla parte. Dans l’ensemble de la partition, le théorbe doublant les voix est parfois indiqué ad libitum ou bien au contraire « théorbe obligate ! »


	Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber (1997), début de la partie de théorbe. Ricordi, München.

Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber (1997), début de la partie de théorbe. Ricordi, München.

Les instrumentistes (cor de basset/clarinette basse et théorbe/guitare) doublent souvent les voix dans les Lamentationes. Le « Cui comparabo te ?» de la lectio seconda est cependant écrit à quatre voix réelles (deux instruments et deux voix de soprano). L’écriture du théorbe est en hauteur réelle et les notes aiguës peuvent être jouées ad lib. en harmoniques. Les annotations manuscrites précisent les harmoniques possibles (mais pas forcément jouées). La proportion entre longueur vibrante des cordes du petit et du grand jeu a des conséquences sur les zones de divisions de la corde où se font les harmoniques. Dans le cas d’un théorbe où le grand jeu est exactement deux fois plus long que le petit, l’octave du grand jeu se trouve au niveau du sillet de tête du petit jeu3.


	Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber, lectio secunda « Cui comparabo te ?»

Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber, lectio secunda « Cui comparabo te ?»

Comme tout instrument à cordes, le théorbe peut être accordé de différentes façons. À l’origine, le choix de la tonalité dictait la façon d’accorder les basses. Les compositeurs utilisent soit un accord ordinaire de l’instrument, soit un accord du grand jeu différent, soit une répartition nouvelle de tous les intervalles des cordes, nommée scordatura, avec parfois une utilisation de micro-intervalles (quart de ton ou autres divisions de l’octave). Dans la lectio tertia des Lamentationes, il faut préparer une guitare avec scordatura en tiers de ton, et la notation en hauteurs réelles est disposée sur trois portées qui précisent sur quelle corde se joue chaque note. Le dernier moment de l’œuvre où intervient la guitare est précédé d’un la bémol grave sur le théorbe posé sur le côté : l’instrumentiste alterne ensuite les basses et accords arpégés sur le théorbe posé avec le jeu en position ordinaire sur la guitare. Klaus Huber reprendra cette écriture sur deux instruments simultanément au début du Miserere hominibus.


	Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber, lectio tertia, mesure 82.

Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdide Klaus Huber, lectio tertia, mesure 82.

 

 

Nouvelle musique pour théorbe : exemples de notations

 

Les cordes ravalées sont caractéristiques de l’accordage du théorbe et permettent unissons, formation d’accords dans des dispositions serrées et mouvements mélodiques distribués sur plusieurs cordes, très courants dans le répertoire ancien sous forme de campanellas (figures conjointes effectuées sur plusieurs cordes, donnant une impression de jeu harpé par l’effet des résonances tuilées). Dans l’écriture contemporaine, cette répartition des cordes est favorable à l’utilisation des micro-intervalles (quarts de ton, tiers de ton). Il est particulièrement utile de noter ces figures avec des tablatures ou des grilles de positions lorsque la notation des accords est très dense. C’est une nécessité dans un passage du Prélude de Diógenes Rivas qui, bien que composé pour un théorbe accordé de façon ordinaire, multiplie par moments des positions de jeu à enchaîner rapidement. Les notations graphiques sont plus faciles à lire et mémoriser.


	Prélude de Diógenes Rivas (1995), extrait du manuscrit avec annotations personnelles pour la réalisation de certains passages et accords sur l’instrument. Les 5 grilles concernent les cinq positions fff de la deuxième portée.

Prélude de Diógenes Rivas (1995), extrait du manuscrit avec annotations personnelles pour la réalisation de certains passages et accords sur l’instrument. Les 5 grilles concernent les cinq positions fff de la deuxième portée.

La notation d’une pièce pour un théorbe avec une scordatura en quarts de ton fait parfois l’objet d’une notation supplémentaire sous forme de numérotation des cordes jouées. C’est le système choisi par Franck C. Yeznikian dans La Chair de l’ombre, Suite en écho d’après une suite de Robert de Visée.


	Esquisses préparatoires manuscrites de Franck C. Yeznikian pour La Chair de l’ombre (1996).

Esquisses préparatoires manuscrites de Franck C. Yeznikian pour La Chair de l’ombre (1996).

Choix de l’accord du théorbe en quarts de ton, ambitus, chiffres et lettres C et D fondent une écriture fortement formalisée et spéculative, s’appuyant sur une analyse des pièces de Robert de Visée ; la sarabande en particulier garde trace des empreintes gestuelles de celle qui a servi de référence.


	La Chair de l’ombredeFranck C. Yeznikian, Prélude.

La Chair de l’ombredeFranck C. Yeznikian, Prélude.

Les chiffres encadrés indiquent les cordes à jouer. Cette précision n’empêche pas que le travail préparatoire pour jouer cette musique ait parfois à s’organiser par des analyses de gestes très méticuleuses.


	Tablature manuscrite précisant quelques positions de la main droite dans un passage du Prélude de La Chair de l’ombre de Franck C. Yeznikian, depuis le si grave de la première ligne presque jusqu’à la fin.

Tablature manuscrite précisant quelques positions de la main droite dans un passage du Prélude de La Chair de l’ombre de Franck C. Yeznikian, depuis le si grave de la première ligne presque jusqu’à la fin.

La tablature manuscrite permet de dessiner les mouvements de la main droite et d’organiser l’anticipation des positions rares : par exemple, à la fin de la première portée sont indiqués entre crochets les placements des doigts (annulaire, majeur et index) pour jouer les cordes suivantes. Ensuite, les deux accords du début de deuxième ligne du prélude se jouent avec les quatre doigts de la main droite pouce, index, majeur et annulaire. L’écartement inhabituel des doigts, et l’enchaînement de deux positions très différentes sur les cordes est bien visualisé ici : il faut passer des cordes 14/10/7/4 aux cordes 10/6/3/2 à la vitesse d’une croche de triolet qui est au tempo 75. La technique de jeu se construit ainsi par analyses précises des gestes à assimiler, mais la possibilité de le réaliser passe ensuite par la mémoire auditive et la projection musicale du discours, dépassant alors la dimension spéculative de cette écriture4.

 

Un autre écriture nécessitant une analyse préparatoire pour réaliser les gestes au tempo est celle de Brice Pauset, qui a inclu le théorbe dans l’instrumentation de M en 1996 et des Vanités en 2002. Dans M, l’accordage du théorbe est ordinaire, de sorte que la lecture des notes est familière, malgré le nombre de doigtés différents possibles. L’écriture rythmique demande cependant un calcul des tempi des figures. C’est un moyen précis pour leur donner forme dans le temps.


	M de Brice Pauset (1996), partie de théorbe, mesure 311. Les tempi des figures rythmiques sont ajoutés au crayon, ainsi que quelques doigtés de main gauche.

M de Brice Pauset (1996), partie de théorbe, mesure 311. Les tempi des figures rythmiques sont ajoutés au crayon, ainsi que quelques doigtés de main gauche.

 

La façon de noter la partition d’une pièce en scordatura est parfois modifiée au cours de sa publication. Cela a été le cas de Vers un désert de Francisco Luque, dont la première version avant l’édition définitive était notée à la fois en hauteur réelle et en notation ordinaire transposée, qui faisait alors fonction de tablature (comme dans les partitions de Heinrich Biber pour violon en scordatura).


	Vers un désert de Francisco Luque (1996), début de la version primitive de l’édition.

Vers un désert de Francisco Luque (1996), début de la version primitive de l’édition.

En marge, la tablature manuscrite précise les octaves comme dans les tablatures anciennes, et des chiffres romains et dessins au crayon indiquent où se trouvent les sons harmoniques du grand jeu sur le théorbe utilisé pour la création. Cet exemple donne une idée claire de la scordatura utilisée et d’une notation en notes. Le choix final à conduit à réaliser une tablature à la façon ancienne, avec des chiffres.


	Vers un désert de Francisco Luque, début de la version définitive, édition gravée par Wim Hoogewerf, CPEA.

Vers un désert de Francisco Luque, début de la version définitive, édition gravée par Wim Hoogewerf, CPEA.

La préface de l’édition précise :

« La tablature, présentée avec les graves en bas, symbolise les 8 cordes du petit jeu, et ne comprend les 6 cordes du grand jeu que lorsque c’est nécessaire.
La notation des harmoniques sur le grand jeu est par convention calquée sur celle du petit jeu. En raison des variations de longueur du grand jeu d’un théorbe à l’autre, chaque instrumentiste devra repérer sur son propre théorbe le milieu de la corde (XII), le tiers (VII), le quart (V) et le cinquième (IV et IX). Il est parfois plus aisé de jouer certaines harmoniques du côté de la rosace. »

Cette question de la répartition des harmoniques sur le petit et le grand jeu pose des problèmes dans des gestes répartis sur les 14 cordes, comme dans la page 4 (voir l’exemple ci-dessous). Pour masquer le saut entre les harmoniques d’octave (indiquées par le XII), et entre les harmoniques de quinte (VII), l’arpègement ne doit pas être trop rapide.

Vers un désert de Francisco Luque est une pièce où la gestualité se déploie dans l’espace des 14 cordes d’une façon jusqu’alors inusitée. Dès le deuxième système, le geste demandé est un « trémolo de la pulpe des doigts effleurant les cordes indiquées. Dans les parties concernées, il faut obtenir une continuité mouvante du son » (Luque, extrait de la préface). Il faut une précision des déplacements et des surfaces de contacts. Plus loin dans la pièce, l’effleurement des cordes s’étend en trémolo jusqu’aux 14 cordes. Étant donné l’étendue de cet espace (14,5 cm au niveau du chevalet), il est utile de frotter simultanément les cordes avec tous les doigts de la main droite.


	Vers un désert de Francisco Luque, p. 4.

Vers un désert de Francisco Luque, p. 4.

Les gestes rapides en aller et retour de l’index, ou bien les gestes de tambora (percussion sur les cordes) répartis sur des zones de deux à quatre cordes demandent un travail de main droite très délicat. La réalisation des sons harmoniques répartis sur les grand et petit jeux est un geste rare qu’il faut repérer.


	Vers un désert de Francisco Luque, p. 6 (noire à 66) : mode de jeu tambora, puis sons harmoniques répartis sur le petit et le grand jeu.

Vers un désert de Francisco Luque, p. 6 (noire à 66) : mode de jeu tambora, puis sons harmoniques répartis sur le petit et le grand jeu.

 

La partie de théorbe de Saori pour cinq instruments à cordes pincées et électronique de José Manuel López López demande une pensée de l’espace de jeu avec des gestes qui puissent couvrir toutes les cordes, soit pour les parcourir en descendant ou montant de façon ininterrompue (parfois en sons étouffés par la main gauche), soit en rasgueado (accord gratté), avec une précision rythmique des gestes d’étouffement des résonances.


	Saori de José Manuel López López (2010), mes. 17.

Saori de José Manuel López López (2010), mes. 17.


	Saori de José Manuel López López, mes. 142. (C.E = cordes étouffées / C.L = cordes libres)

Saori de José Manuel López López, mes. 142. (C.E = cordes étouffées / C.L = cordes libres)

C’est une musique où la texture sonore des différents gestes se mêle à la granulation électronique.

 

La même mobilité et densité d’activité, avec une sonorité très bruitée, se trouve dans la pièce de Arturo Fuentes composée avec un traitement informatique live à l’Ircam en 2003. L’espace instrumental du théorbe est exploité intensément dans ses possibilités de déplacements et de contrastes dynamiques, y compris avec des sections nerveuses de frottements des cordes filées avec un médiator, et de pizzicati Bartók (claquements des cordes sur la touche). L’instrumentiste est parfois confronté à la difficulté de lutter contre le réflexe de replacer la main droite pour rendre les gestes cohérents avec les sons électroniques, notamment lors des transformations des sons par transpositions.


	Objet-Object de Arturo Fuentes (2003), mes. 37 : accords sur l’ensemble des cordes, figures rapides sur le grand jeu en alternance avec des figures jouées par la main gauche seule.

Objet-Object de Arturo Fuentes (2003), mes. 37 : accords sur l’ensemble des cordes, figures rapides sur le grand jeu en alternance avec des figures jouées par la main gauche seule.


	Objet-Object de Arturo Fuentes,mes. 104. Déplacements de sons harmoniques sur le grand jeu, en accords répétés ou en arpèges, en alternance avec le petit jeu. À la mes. 116 : tapping des deux mains sur le petit jeu, où, en raison de la dimension de l’instrument, il est assez difficile de trouver les appuis nécessaires au positionnement du jeu des deux mains frappant directement sur la touche du théorbe.

Objet-Object de Arturo Fuentes,mes. 104. Déplacements de sons harmoniques sur le grand jeu, en accords répétés ou en arpèges, en alternance avec le petit jeu. À la mes. 116 : tapping des deux mains sur le petit jeu, où, en raison de la dimension de l’instrument, il est assez difficile de trouver les appuis nécessaires au positionnement du jeu des deux mains frappant directement sur la touche du théorbe.

Dans ces œuvres avec électronique, le niveau sonore global et l’amplification nécessaire du théorbe le situent à distance de sa représentation dans la musique ancienne.

 

 

La création pour théorbe : une fabrique de l’écoute

 

L’interprète a pour fonction de faire sonner une œuvre écrite par un compositeur, son travail sur l’instrument est une fabrique de sa propre écoute. L’écoute de l’instrumentiste est un art complexe qui met en jeu des compétences sensibles, intellectuelles et corporelles. Toucher à un aspect de ces compétences fait évoluer l’ensemble. La création de nouvelle musique nécessite en général une disponibilité de l’interprète pour réinventer des techniques corporelles.

L’étude du répertoire du théorbe est une relecture de traces écrites des gestes des luthistes du XVIIe siècle. La notation en tablature ne précise cependant pas tout. Pour jouer ces pièces, il faut résoudre quantité de problèmes, différents en fonction des auteurs. Les lire et les pratiquer revient à se poser à soi-même des énigmes, car les façons de jouer du théorbe étaient diverses selon les musiciens et les zones géographiques en Italie, puis en France. Le théorbiste d’aujourd’hui est polyvalentet ne doit pas standardiser sa « technique » de jeu.
Présenter le théorbe à des compositeurs passe toujours par l’écoute de pièces originales et la description des techniques les plus idiomatiques.

Dans les échanges avec les compositeurs5, la présentation du théorbe nécessite plusieurs approches : l’objet lui-même avec la description de ses éléments constitutifs, la façon d’en jouer héritée du répertoire et de l’expérience des instrumentistes actuels, et enfin son répertoire, c’est-à-dire son écosystème esthétique d’origine et son devenir contemporain.

À ces trois niveaux d’observation correspondent trois niveaux d’étude d’une réapparition du théorbe :

- l’instrument de musique, comme tout objet à la fois technique et symbolique ;

- le geste instrumental, technique acquise et liberté d’exploration ;

- la création, la réinvention, le nouvel imaginaire nourris d’une culture contemporaine qui englobe les musiques du passé et les références aux techniques d’écritures occidentales.

Faire des prouesses gestuelles sur un instrument ne m’intéresse pas. Ce qui est important en revanche, c’est ce qui sonne, et la réalisation de ce qui n’avait jusqu’alors jamais accédé à une écoute.
Dans la musique instrumentale, la fabrique du matériau sonore se fait dans l’instant même de son écoute. C’est un matériau voué à la disparition. Une manufacture chorégraphiée de formes sonores se déploie dans l’espace-temps d’une écoute. Chacun, par son écoute, en garde trace, relie, s’étonne, s’émeut.

Bibliographie

Livres et partitions

CASTALDI, B.

1981 (1622), Capricci a due stromenti cioe tiorba e tiorbino,facsimile, Genève, Minkoff.

 

FÉNELON, P.

1998, Arrière-pensées, Entretiens avec Laurent Feneyrou, Paris, Éditions Musica Falsa.

2002, Prélude et Lamento pour théorbe, Paris, Amphion.

 

FUENTES, A.

2003, Objet-Object pour théorbe et électronique, inédit


HADDAD, K.

2008, Purple Cloud on the Edge of the Invisible Sea, inédit.

 

HUBER, K.

1997, Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdi pour ensemble vocal, théorbe/guitare et cor de basset/clarinette basse, Munich, Ricordi.

1999, Umgepflügte Zeit,GesammelteSchriften (Eine umfassende Sammlung von Texten, Vorträgen und Interviews aus den Jahren 1959-1999), hrsg. von Max Nyffeler, Cologne, Verlag MusikTexte.

2016, Von Zeit zu Zeit [De temps en temps], Entretiens avec Claus-Steffen Mahnkopf, Clichy, Éditions de l’île bleue.

 

LÓPEZ LÓPEZ, J. M.

1998, Vers un désert, collection guitare microtonale Wim Hoogewerf, Paris, Christine Paquelet Édition Arts.

2010, Saoripour ensemble et électronique, inédit.

 

LUQUE, F.
1998, Vers un désert pour théorbe, collection guitare microtonale Wim Hoogewerf, Paris, Christine Paquelet Édition Arts

 

MULSANT, F.

1998, Tiento pour théorbe, Kassel, Furore.

 

PAUSET, B.

1996, M, Paris, Lemoine.

 

YEZNIKIAN, F. C.

2006, La Chair de l’ombre, Suite en écho à une suite de Robert de Visée pour théorbe solo, inédit
 

Discographie

ESCAICH, T.

2006, Exultet, Terra desolata, Ensemble vocal Sequenza 9.3, Accord.

 

FÉNELON, P.

1998, Dix-huit madrigaux, Les jeunes solistes, dir. Rachid Safir, Grave.

 

HUBER, K.

2000, Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdi, Les jeunes solistes, dir. Rachid Safir, Paris, Plus loin.

2008, Miserere hominibus, Les jeunes solistes, dir. Rachid Safir, Paris, Soupir édition.

 

LUQUE, F.

1999, Góngora, Paris, Lycaon.

 

SÖDERBERG, P.

2010, Liuto con forza, Phono Suecia PSCD 186.

 

Sites Internet

https://soundcloud.com/arturofuentes/objet-object-theorbe-and?in=arturofuentes/sets/guitar-music-5

extrait de Objet-Object pour théorbe et électronique, création 2003 à l’Ircam par Caroline Delume.

consulté le 11/12/2016

https://www.youtube.com/watch?v=M-0T1upSN_c

Was Weiter Wird Werdenpour ensemble vocal et instrumental de Franck C. Yeznikian, création en 2012 à Bruxelles.

cnsulté le 11/12/2016

https://www.youtube.com/watch?v=SNANCX7Mcvg

Caravaggiode Suzanne Giraud (acte 1, scène 5), création en 2012 par Les Siècles à l’Opéra de Metz, direction François-Xavier Roth.

consulté le 11/12/2016

https://www.youtube.com/watch?v=NZPCfPoQdTo

Die fette Seelede Klaus Lang, création en 2013.

consulté le 11/12/2016

https://www.youtube.com/watch?v=gDVpQb9dtr4
La Chair de l’ombre de Franck Yeznikian, interprétation de Caroline Delume, concert du 16/01/ 2016

consulté le 11/12/2016

Notes

1 Les compositeurs contemporains qui utilisent des instruments anciens le font souvent en relation avec la musique ancienne. La relation peut s’exprimer dans le choix d’une forme ou l’évocation d’un titre : Préludes, Tiento pour théorbe de Florentine Mulsant, La Chair de l’ombre, Suite en écho d’après une suite de Robert de Visée de Franck C. Yeznikian, Mémoires Temporelles-Suites de danses pour théorbe de Philippe Raynaud (création par Thibaut Roussel), Lune viscérale allaitant un soleil chu (2014) pour théorbe et électronique de Loïc Sylvestre (qui commence par un Preludio in stilo francese). Les compositeurs peuvent également opérer par références : Vision and Ashes for theorbo de Lars Ekström (création par Peter Söderberg), qui cite Frog Gaillard de John Dowland, et Purple Cloud on the Edge of the Invisible Sea de Karim Haddad, qui s’appuie sur une réminiscence de l’air de Didon et Enée “When I am laid in earth”de Henry Purcell. Il s’agit parfois d’un texte pour les pièces avec voix :Góngora (1995) de Francisco Luque, sur un poème de Luis de Góngora, Terra desolata (2001) de Thierry Escaich, ou bien Canzoniere CXXVI d’après Pétrarque (2015) de Bun-Ching Lam. Dans die fette Seele, Klaus Langcite La rappresentatione di anima e di corpo de Emilio de’ Cavalieri (1600), compositeur membre avec Jacopo Peri et Giulio Caccini de la Camerata fiorentina, et par conséquent à l’origine du style de monodie qui a favorisé l’essor du théorbe comme instrument d’accompagnement.

2 La lectio prima des Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdi a eu lieu en 1993 a cappella par l’ensemble vocal Les jeunes solistes (aujourd’hui Solistes XXI) dirigé par Rachid Safir. J’ai rencontré Klaus Huber en tant que guitariste de cet ensemble lors des concerts des Canciones de circulo gyrante donnés à partir de 1992. La première œuvre composée spécifiquement pour Les jeunes solistes par Klaus Huber a été l’Agnus Dei cum recordatione pour voix, vièles et luth renaissance en 1991. C’était à la suite d’un concert Dufay donné par cet ensemble. Klaus Huber a ensuite répondu à la demande de Rachid Safir de pièces à intercaler entre des répons de Gesualdo, et s’est intéressé au théorbe alors que je jouais le continuo du Magnificat de Monteverdi. Il donne des détails à propos de ces rencontres dans ses écrits (Huber, 1999, p. 237, et Huber, 2016, p. 102), en particulier sur son choix d’ajouter une partie de théorbe dans les Lamentationes Sacrae et Profanae ad Responsoria Iesualdi, dont la création a eu lieuà Witten en 1997, et sur son approche des tempéraments anciens.

3 Peter Söderberg, luthiste très engagé dans la musique contemporaine, a spécialement acquis un théorbe ayant strictement un grand jeu deux fois plus long que le petit pour avoir une organisation logique des harmoniques dans l’espace de jeu.

4 Lors d’une séance de travail sur La Chair de l’ombre en décembre 2015, Franck Yeznikian a insisté sur la question des résonances, et en particulier sur la nécessité de lire les durées écrites comme des indications relatives et non comme une loi absolue. La cohérence des phrasés peut amener à raccourcir des valeurs. J’en avais noté des remarques utiles : « le tempo est en relation avec la résonance », « pas trop long, de façon à ce que la figure suivante puisse être une émanation », « incarner la musique dans la situation, dans l’intention consciente que chaque note doit pouvoir résonner de la vie donnée ». Il en résulte un rapport à la partition plus souple, très important dans une pièce comme la courante, dont l’écriture rythmique serait irréalisable dans le tempo sans une conscience de la nécessité de marquer les basses en cordes à vide comme un cantus firmus portant un discours en diminutions.

5 La création de nouvelle musique ne peut se concrétiser qu’au travers des rencontres entre les personnes. En 1995, j’ai créé plusieurs œuvres pour théorbe à Paris pour le concert du dixième anniversaire de la Société française de luth (SFL), à l’initiative de Carlos Gonzalez, luthier qui a été le secrétaire de la SFL de 1988 à 1999, qui était convaincu de l’importance de développer la composition de nouvelles œuvres pour luth. Pour cette occasion ont été composés le Tiento de Florentine Mulsant, le Prélude de Diógenes Rivas, le Ricercare de Jorge Labrouve et Góngora de Francisco Luque pour voix et instruments anciens. Par la suite, Carlos Gonzalez a organisé un concert à Gijón en 2006, pour lequel j’ai commandé Vers un désert de Francisco Luque et La Chair de l’ombre de Franck C. Yeznikian.

En 1996, deux œuvres programmées lors du Festival d’Automne à Paris demandaient un théorbe : les Madrigaux de Philippe Fénelon (création le 18/11/1996 à l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, par Les jeunes solistes, direction Rachid Safir) et M de Brice Pauset (création le 09/12/1996, à l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, par l’ensemble Recherche sous la direction de Kwamé Ryan). J’avais rencontré Brice Pauset à Darmstadt en 1992, et notre première conversation avait porté sur le théorbe et l’air de cour français. Cette anecdote montre que toutes les créations pour théorbe ont bénéficié de relations personnelles avec des compositeurs sensibles aux instruments anciens, et en particulier au théorbe.

Pour citer ce document

Caroline Delume, «Questions instrumentales dans la création pour théorbe», La Revue du Conservatoire [En ligne], Création / Re-création, La revue du Conservatoire, Le cinquième numéro, mis à jour le : 05/07/2017, URL : https://larevue.conservatoiredeparis.fr:443/index.php?id=1688.

Quelques mots à propos de :  Caroline Delume

Caroline Delume est guitariste et théorbiste. Son répertoire s’étend du XVIIe au XXIe siècle, avec de nombreuses créations (œuvres de Pascale Criton, Félix Ibarrondo, Philippe Fénelon, Suzanne Giraud, José Manuel López López, Francisco Luque, Clara Maïda, Laurent Martin, Florentine Mulsant, Brice Pauset, Gérard Pesson, Philippe Leroux, Klaus Huber). Elle étudie la musique du XIXe siècle et les guitares de l’époque. Elle joue en Europe, au Japon, en Amérique latine, et participe à des concerts des ensembles Le Concert Spirituel, Solistes 21, 2e2m, l’Ensemble intercontemporain, West-Eastern Divan Orchestra, Les Siècles, ainsi qu’à des concerts de musique de chambre avec de nombreux musiciens. Diplômée du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris en guitare et en analyse dans les classes de Alexandre Lagoya, Claude Ballif et Michaël Levinas, elle y est professeur de lecture à vue, et est aussi professeur de guitare des conservatoires de la Ville de Paris. Parmi ses enregistrements, citons L’Art de la guitare contemporaine (Arion) et Multifonia 95, musique de chambre espagnole (l’empreinte digitale). Auteur d’articles d’analyse sur la Sequenza pour guitare de Berio, le geste chez Lachenmann, sur Sciarrino, entre autres, et co-auteur de La Musique au XXe siècle, de Schoenberg à nos jours (Fuzeau), elle a édité les Traités pour guitare en France 1600-1800 (Fuzeau).